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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature
Volume 137, Numéro 138

Le mardi 11 mai 1999
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mardi 11 mai 1999

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La semaine nationale des soins infirmiers

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que la semaine du 10 au 16 mai est la Semaine nationale des soins infirmiers. Cette semaine a pour but d'accroître la sensibilisation du public, des décideurs et du gouvernement sur ce sujet. Le thème choisi pour cette année est «La personne âgée et l'infirmière - Partenaires de santé». Ce thème vise à nous rappeler le nombre croissant de personnes âgées dans la société et la contribution qu'apportent les infirmiers et les infirmières pour améliorer leur santé et leur qualité de vie.

Les infirmiers et les infirmières sont à la base même de notre système de soins de santé. C'est souvent eux que nous voyons en premier quand nous nous rendons au cabinet d'un médecin ou dans un service d'urgence. Les infirmiers et infirmières diplômés se sont longtemps battus pour cet accès direct aux services de soins infirmiers qui est de plus en plus la règle de nos jours. Cet accès direct signifie que le public a le droit de choisir un infirmier ou une infirmière comme pourvoyeur de soins de santé sans devoir consulter un autre professionnel de la santé ou être admis dans un hôpital ou un autre établissement de santé. Nous devrions donc voir de plus en plus d'infirmiers et infirmières s'occuper principalement des soins primaires, ce qui, à mon avis, ne manquera pas d'être avantageux pour tout le monde.

J'aimerais vous présenter deux exemples d'accès direct. Une mère de famille téléphone à un service d'urgence pédiatrique au sujet de son enfant malade. Une infirmière lui donne des conseils sur la façon de contrôler la fièvre et d'autres indications. L'infirmière rappelle la dame quelques heures plus tard pour prendre des nouvelles. Cette simple mesure a permis d'éviter une visite inutile à l'urgence.

Dans mon deuxième exemple, une infirmière du groupe d'évaluation en vue d'un placement à long terme rend visite à un veuf âgé qui doit être placé dans un foyer. Après avoir fait son évaluation, l'infirmière détermine qu'il aurait besoin d'aide à domicile jusqu'à son déménagement et l'aide à prendre les mesures nécessaires.

Cette innovation peut avoir un effet positif sur les soins médicaux dans ce pays. En dépit de ces changements positifs, on observe un mécontentement chez les infirmières et infirmiers parce qu'aucun ordre de gouvernement n'a daigné les faire participer au processus de réforme de notre régime de soins de santé. Si nous voulons que la qualité des soins de santé se maintienne au Canada, il nous faut faire participer les infirmières et infirmiers à chaque étape de ce processus.

Les statistiques publiées hier par l'Institut canadien d'information sur la santé en témoignent. Ces données révèlent qu'un nombre grandissant d'infirmières et infirmiers abandonnent la profession. De moins en moins de jeunes considèrent la profession d'infirmière comme un bon choix de carrière et un nombre accru d'infirmières et infirmiers sont contraints de travailler à temps partiel ou occasionnel, ce qui ne fait qu'ajouter à l'insécurité. Une étude commandée en 1997 par l'Association canadienne des infirmières et infirmiers du Canada concluait que si des mesures ciblées n'étaient pas mises en oeuvre sous peu, le Canada souffrirait d'une grave pénurie d'infirmières et infirmiers - de 56 000 à 113 000 - d'ici 2011.

À la lumière de ces données et d'autres, honorables sénateurs, il est clair que le recrutement d'infirmières et infirmiers et leur maintien en poste doivent figurer en tête de liste des priorités en matière de santé.

La Semaine nationale des soins palliatifs
La Semaine nationale des soins infirmiers

L'honorable Thérèse Lavoie-Roux: Honorables sénateurs, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui à l'occasion de la Semaine nationale des soins palliatifs et de la Semaine nationale des soins infirmiers.

Les soins palliatifs, c'est une approche des soins de santé axée sur l'amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies graves. Il s'agit de soulager les souffrances. On aborde la famille de façon globale. On s'occupe du malade, certes, mais également des membres de sa famille et des aidants, afin de tenir compte des nombreux aspects que comporte l'expérience de la souffrance. Les soins palliatifs vont bien au-delà des soins curatifs traditionnels.

[Français]

Honorables sénateurs, les soins palliatifs favorisent des principes qui revêtent une importance fondamentale pour assurer le bien-être des malades en phase terminale et de leurs familles. Ils visent à soulager, voire à supprimer la douleur physique, qui peut habituellement être bien contrôlée lorsqu'on possède les connaissances voulues. De plus, ils représentent un engagement à intervenir auprès de la personne dans sa globalité: atténuer les angoisses spirituelles, existentielles ou psychologiques que suscitent la crainte de la mort et de la perte d'un être cher.

L'équipe chargée des soins palliatifs aide ainsi le malade et les familles ou les soignants à composer avec les menaces et les incertitudes que présente la maladie.

[Traduction]

Honorables sénateurs, comme nous le savons tous, les Canadiens vivent plus longtemps et la proportion de Canadiens de plus de 65 ans augmente régulièrement. Même si les soins palliatifs ne sont absolument pas limités aux aînés, la grande majorité des services de soins palliatifs s'adressent à des gens plus âgés. Ainsi, à cause du vieillissement de la population et de l'augmentation prévue du nombre de cancers et de maladies chroniques, on s'attend à un accroissement important de la demande pour des services de soins palliatifs. De plus, Statistique Canada prévoit qu'il y aura une augmentation de la demande générale de soins de santé à cause du vieillissement de la population.

[Français]

Les sénateurs ont reçu récemment, soit le 4 mars 1999, une lettre de la présidente de l'Association canadienne des soins palliatifs, Jacqueline Fraser, les alertant de l'absence de représentation des soins palliatifs au Conseil d'administration des Instituts canadiens de la recherche en santé. La recherche en soins palliatifs représente actuellement moins d'un pour cent des subventions totales accordées annuellement par les instituts de recherche en santé, bien que les soins palliatifs prennent de plus en plus de place dans nos soins de santé.

À la suite du travail du comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide, je conclus avec confiance que les soins palliatifs demeurent une des solutions les plus humaines pour ceux qui font face aux questions liées à la fin de la vie.

[Traduction]

À l'occasion de la Semaine nationale des soins palliatifs, nous reconnaissons l'importance de cette ressource d'une si grande valeur et encourageons le développement des soins palliatifs et les efforts pour les améliorer au Canada.

Il y a eu un accroissement marqué du développement des services de soins palliatifs depuis que nous avons rendu notre rapport public, il y aura cinq ans en juin. L'un des principaux intervenants dans les soins palliatifs, que ce soit à l'hôpital, dans un établissement ou à la maison, est l'infirmière ou l'infirmier. Étant donné que cette semaine est également la Semaine nationale des soins infirmiers, nous avons l'occasion de reconnaître la contribution sociale importante que les infirmières et infirmiers font à la vie des Canadiens.

Le thème de la Semaine nationale des soins infirmiers cette année est «La personne âgée et l'infirmière - Partenaires de santé». Les infirmières et infirmiers jouent un rôle important dans la prestation de soins de santé tout au cours de notre vie. Le lien entre les infirmières et infirmiers et les personnes âgées est un partenariat qui dure toute une vie et qui ne se développe non pas à partir de l'âge de 50 ou 60 ans, mais dès la naissance et qui se poursuit à l'adolescence et à l'âge adulte. Les infirmières et infirmiers touchent nos vies à de nombreux stades et nous devons les remercier dans une certaine mesure lorsque nous avons la chance d'arriver à l'âge de la vieillesse en bonne santé. Je suis heureuse d'avoir l'occasion aujourd'hui de souligner cette grande contribution à la société.

Au Canada, 260 000 infirmières et infirmiers s'occupent avec beaucoup de dévouement et de compassion de millions de Canadiens. Dans toutes les provinces, cependant, à l'exception de Terre-Neuve, le nombre d'infirmières et d'infirmiers par rapport à la population diminue. De plus, on prévoit une grave pénurie de 59 000 à 113 000 infirmières ou infirmiers d'ici l'an 2011.

Honorables sénateurs, sera-t-il possible de répondre aux demandes de santé du pays? Même à l'heure actuelle, nous sommes au courant des pénuries dans le domaine des soins infirmiers et des pressions exercées sur les infirmières et infirmiers pour répondre à une demande croissante quant aux soins de santé.

[Français]

Un article récent écrit par Jean-François Bégin, du journal La Presse, maintient que, et je cite:

La profession infirmière vit des heures sombres au Canada et l'avenir ne s'annonce guère plus encourageant, à moins d'une intervention énergique des gouvernements.

Dans l'article, la présidente de l'Association canadienne des infirmières, Ginette Lemire-Rodger, constate que, et je cite:

Les infirmières se retrouvent à ne plus être capables de donner les soins qu'elles considèrent devoir donner.

[Traduction]

Les grèves des infirmières à Terre-Neuve, en Colombie-Britannique et en Saskatchewan constituent des exemples de mesures extrêmes qui ont pour le moins pour rôle de nous sensibiliser à la gravité du problème des infirmières épuisées et frustrées.

Son Honneur le Président: Je regrette de devoir interrompre l'honorable sénateur, mais le temps qui lui était imparti est écoulé.

Les honorables sénateurs permettent-ils qu'elle poursuive?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je remercie les honorables sénateurs.

De toute évidence, la restructuration des soins de santé et les compressions budgétaires ont fait des victimes. La qualité des soins de santé dont bénéficient les Canadiens est une source de fierté pour notre nation. Comment pouvons-nous nous assurer qu'elle restera une grande priorité? Comment pouvons-nous nous assurer que tous les Canadiens, où qu'ils vivent et quelle que soit leur situation financière, aient accès aux services de soins infirmiers et de soins palliatifs dont ils ont besoin? Créons-nous les conditions nécessaires pour accueillir les réformes de façon à améliorer la qualité des soins de santé dans nos collectivités?

Il y a sept ans, le rapport sur les soins palliatifs de l'an 2000 annonçait 117 recommandations comprenant la mise en place au Canada d'au moins 16 centres régionaux de soins palliatifs, regroupant des unités d'enseignement, de recherche et de consultation pour toute la région sanitaire et servant de base pour les soins palliatifs spécialisés à domicile; la mise en place d'un programme d'études obligatoires sur les soins palliatifs dans toutes les écoles formant des professionnels de la santé; et l'établissement des soins palliatifs comme spécialité reconnue en médecine et en soins infirmiers.

À l'occasion de la Semaine nationale des soins infirmiers, réfléchissons à ces questions et, surtout, faisons l'éloge de l'excellence des soins, en dépit des conditions trop souvent difficiles. Célébrons la contribution faite aujourd'hui à l'amélioration du bien-être des Canadiens.

La semaine nationale des soins infirmiers

L'honorable Marian Maloney: Honorables sénateurs, je prends également la parole aujourd'hui pour reconnaître la précieuse contribution des infirmières canadiennes. Ces héroïnes inconnues sont les principales personnes qui fournissent des soins dans le cadre de notre système de santé surtaxé. Elles constituent la force et la base des soins de santé au Canada aujourd'hui. Nous devrions reconnaître chaque jour la contribution de ces personnes. Néanmoins, cette semaine, leur contribution est officiellement reconnue par le public.

La semaine du 10 au 16 mai est la Semaine nationale des soins infirmiers. Cette année, les infirmières et infirmiers du Canada ont axé cette semaine sur l'Année internationale des personnes âgées. Des activités sont prévues dans tout le pays afin de sensibiliser le public aux besoins des personnes âgées en matière de soins, de donner des informations pratiques sur les questions de santé et les ressources disponibles et de sensibiliser le public aux besoins de notre population diversifiée et vieillissante.

Plus de 200 000 infirmières et infirmiers au Canada s'occupent des personnes dans le besoin. Le dévouement de ces infirmières et infirmiers qui travaillent parfois dans des conditions difficiles vaut qu'on leur marque notre reconnaissance et qu'on leur adresse nos félicitations.

Nous rendons hommage à toutes les infirmières et à tous les infirmiers.

Les affaires indiennes

La discussion de l'arrangement avec les Musqueam détenteurs de baux

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, mercredi, le 27 avril, j'ai reçu une lettre adressée à moi et au sénateur Ed Lawson au sujet des réunions que nous avons eues récemment avec les Musqueam détenteurs de baux. J'ai fait circuler cette lettre parmi les membres du comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Elle concerne la réunion que nous avons tenue avec les détenteurs de baux et nous reproche de ne pas avoir rencontré la bande indienne. Elle met en doute le fait que nous représentons tous les Canadiens.

Le sénateur Lawson et moi avons décidé qu'il serait juste que nous rencontrions la bande de Musqueam. Nous avons dit que nous étions prêts à la rencontrer immédiatement étant donné la controverse à laquelle donne lieu le projet de loi C-49 et le sort des Musqueam détenteurs de baux. Il a été convenu que la réunion aurait lieu le mercredi 5 mai. Afin de pouvoir nous rendre à cette réunion, le sénateur Lawson et moi n'avons pu assister aux séances du comité des peuples autochtones, qui entendait plusieurs témoins venus de la Colombie-Britannique. Il était important que nous assistions à ces séances, mais nous avons pensé qu'il était juste que nous rencontrions la bande indienne. Nous avons donc remis notre voyage à Ottawa. Toutefois, la réunion, prévue à 14 heures le mercredi, a été reportée à 17 heures, puis annulée. Il importe de noter au compte rendu que, si une lettre circule au sujet de la représentation de tous les Canadiens par les sénateurs, nous étions disposés à rencontrer la bande autochtone Musqueam et que nous avions pris les dispositions voulues pour le faire le plus rapidement possible, afin que ses représentants puissent présenter un exposé cette semaine, avant la tenue des audiences du comité sénatorial.

(1420)

On ne nous a pas expliqué pourquoi cette réunion a été annulée à deux ou trois reprises. Il importe cependant de consigner au compte rendu que nous représentons tous les Canadiens et que nous n'avons aucun parti pris. Les détenteurs de baux nous avaient invités à les rencontrer, et nous avions répondu à l'invitation de rencontrer les autochtones. On lira cela dans le compte rendu.

L'honorable Edward M. Lawson: Honorables sénateurs, je voudrais ajouter un bref commentaire. D'abord, j'appuie les observations du sénateur St. Germain. J'ajouterai que, si j'étais soupçonneux, je penserais que le chef de la tribu a peut-être été plus malin que nous. Ses représentants se sont organisés pour nous garder à Vancouver en prétextant une rencontre que nous devions avoir avec eux, à leur demande, afin que nous manquions les audiences du Sénat, où nous protestions peut-être trop fort contre le traitement injuste qui est réservé aux propriétaires. N'étant pas soupçonneux de nature, je présume que c'est ce qui s'est produit.

Lorsque nous avons rencontré les propriétaires, plusieurs nous ont raconté des histoires d'horreur. En effet, ils se sont présentés devant un comité indépendant de la tribu pour en appeler de leurs évaluations foncières. Ils ont appris par la suite que le comité indépendant avait démissionné à cause de l'ingérence de la tribu. Cet organisme indépendant a été remplacé par un nouveau comité nommé par la tribu, et les propriétaires ont perdu tous les autres appels qu'ils avaient déposés.

La conduite qu'ont adoptée le chef et la tribu dans cette situation dissipe certainement tous les doutes que j'ai pu nourrir au sujet de l'authenticité et de l'exactitude des faits relatés par les propriétaires.

Garde et droit de visite des enfants

La réponse du gouvernement au rapport du comité mixte spécial

L'honorable Landon Pearson: Honorables sénateurs, le gouvernement a déposé hier sa réponse au rapport du comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants, intitulé: «Pour l'amour des enfants».

Même si j'ai l'intention de commenter en détail, au moyen d'une interpellation que je déposerai sous peu, la stratégie du gouvernement visant à réformer le système actuel, je voudrais profiter de la période réservée aux déclarations de sénateurs pour exprimer brièvement mes premières réactions.

Dans l'ensemble, ma réaction est positive. Je suis heureuse que le gouvernement ait pris au sérieux nos principales recommandations selon lesquelles, entre autres, lorsqu'un divorce affecte un enfant, les intérêts et le point de vue de l'enfant doivent se trouver au centre de toute décision. Les enfants ne sont pas des biens matrimoniaux et ils ne doivent pas servir d'enjeux au cours des différends entre leurs parents. Je suis contente que le gouvernement l'ait reconnu, parce que chaque enfant de chaque couple est unique et que personne ne peut décider à l'avance des dispositions qu'il convient de prendre. Autrement dit, il ne saurait y avoir une seule solution.

L'État ne peut appuyer une formule particulière concernant le rôle des parents après un divorce. Toutefois, le gouvernement s'est engagé à aider les parents à remplir leurs responsabilités à l'égard de leurs enfants avec un esprit de collaboration et d'ouverture. La planification, la médiation, l'éducation et les services jouent tous un rôle pour refroidir les esprits en cas de divorce, de manière à éviter le plus de souffrances possible aux enfants et aux parents.

Je suis particulièrement satisfaite de constater que le gouvernement semble avoir accepté le témoignage des enfants, selon lequel l'essentiel pour eux consiste à maintenir les relations avec leurs parents et les familles élargies. Les grands-parents ont également exprimé ce sentiment. Le gouvernement cherchera des moyens pour favoriser les bonnes relations après le divorce et pour reconnaître le désir des grands-parents d'assumer leurs responsabilités envers les enfants.

Il est également bon que le gouvernement ait donné suite au souhait du comité, de sorte qu'avant longtemps, personne au Canada ne pensera aux enfants en termes de garde et d'accès. Ces termes reflètent un sentiment de propriété et de contrôle, et non la valeur que notre société accorde aux soins des enfants et aux responsabilités les concernant. Le gouvernement accepte de remplacer ces termes par l'expression «partage des responsabilités parentales» ou une expression similaire. Il ne s'agit pas d'une formule s'appliquant à un arrangement particulier, mais bien d'une reconnaissance que les responsabilités parentales continuent tant que l'enfant en a besoin ou, selon mon expérience, toute sa vie durant.

La réaction du gouvernement montre aussi qu'il est au courant des préoccupations concernant la violence dans certains cas de divorce, dont nous avons parlé dans notre rapport, ainsi que des préoccupations concernant les fausses accusations d'agressions. D'un bout à l'autre de son document, le gouvernement confirme que la principale préoccupation porte sur la sécurité et l'intégrité des enfants. On voit bien par sa réaction que le gouvernement reconnaît que l'État ne peut pas punir les parents ou les forcer à devenir des parents modèles. Heureusement, c'est quand même ce que la plupart des parents veulent être. La stratégie du gouvernement consiste à donner aux parents les outils dont ils ont besoin pour coopérer tout en les dissuadant d'utiliser leurs enfants comme des armes en cas de divorce. Quand un parent refuse sans raison à son enfant le droit de voir son autre parent, le gouvernement recommande une intervention rapide, la médiation et d'autres mesures positives pour régler le conflit. Le gouvernement affirme que le châtiment serait la mesure de dernier recours pour les récalcitrants, quand le problème ne semble pas pouvoir se régler.

Personne ne gagne quand un conflit profond ou un divorce de parents à couteaux tirés affecte les enfants. La réaction du gouvernement est un pas dans la bonne direction. Elle permet aux parents d'agir en adultes afin que les enfants puissent grandir comme des enfants. Comme tous les parents devraient être en mesure de vous le dire, pour être un adulte accompli, il faut notamment apprendre à écouter les enfants.


Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je veux porter à votre attention la présence à notre tribune d'un groupe de jeunes Canadiens distingués, soit l'équipe des jeunes qui travailleront tout l'été comme guides touristiques au service des gens qui viennent des quatre coins du Canada et du monde entier pour visiter le Parlement du Canada.

Des voix: Bravo!

[Français]

Ces jeunes guides canadiens ont passé hier une grande partie de la journée ici même, au Sénat. Ils ont rencontré un certain nombre de sénateurs. Je remercie beaucoup les honorables sénateurs pour leur présentation.

Nous sommes heureux de vous recevoir aujourd'hui au Sénat.


AFFAIRES COURANTES

L'ajournement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à demain, le mercredi 12 mai 1999, à 13 h 30.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

La Loi nationale sur l'habitation
La Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement

Projet de loi modificatif-Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-66, Loi nationale sur l'habitation et la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement et une autre loi en conséquence.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 57(1)f) du Règlement, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

La Loi d'exécution du budget de 1999

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-71, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 février 1999.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 57(1)f) du Règlement, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

La Loi de 1998 modifiant l'impôt sur le revenu

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-72, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, mettant en oeuvre des mesures découlant de changements apportés à la Convention fiscale de 1980 entre le Canada et les États-Unis et modifiant la Loi sur l'interprétation des conventions en matière d'impôts sur le revenu, la Loi sur la sécurité de la vieillesse, la Loi sur les allocations aux anciens combattants et certaines lois liées à la Loi de l'impôt sur le revenu.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 57(1)f) du Règlement, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

[Plus tard]

Transports et communications

Avis de motion visant à autoriser le comité à permettre la diffusion électronique de ses délibérations

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement:

L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mercredi 12 mai 1999, je proposerai:

Que le comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.

garde et droit de visite des enfants

La réponse du gouvernement au rapport du comité mixte spécial-Avis d'interpellation

L'honorable Landon Pearson: Honorables sénateurs, je donne avis que, le jeudi 13 mai 1999, j'attirerai l'attention du Sénat sur la réponse du gouvernement au rapport du comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants, intitulé: «Pour l'amour des enfants».

PÉRIODE DES QUESTIONS

L'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

Le conflit en Yougoslavie-Les frappes aériennes sur l'ambassade de Chine-La participation de militaires canadiens à la planification des missions de bombardement

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Vendredi dernier, une bombe de l'OTAN est tombée sur l'ambassade de Chine à Belgrade, semant partout une grande consternation. Le Canada participe-t-il à la sélection des cibles visées par les bombardements de l'OTAN? Si le Canada a quelque chose à voir avec le renseignement erroné qui a eu pour effet que l'ambassade de Chine à Belgrade soit la cible de bombardements, notre pays aurait pu éviter cette erreur en fournissant un annuaire téléphonique de Belgrade qui soit à jour et qui indique où est située l'ambassade.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, à ma connaissance, le Canada n'a pas participé à la mission. Cependant, je suis certain qu'il n'a pas participé à sa planification.

Au cours du week-end, le Canada a dit clairement qu'il regrettait profondément que les opérations aériennes de l'OTAN aient causé la mort de civils à l'ambassade de Chine. Le premier ministre Chrétien a écrit au président de la Chine pour lui témoigner notre tristesse face à cet accident. Le ministre des Affaires étrangères et d'autres représentants du Canada ont livré des messages semblables. C'était effectivement une erreur tragique. L'OTAN ne vise pas délibérément des ambassades ou des civils.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, la collecte de renseignements fait partie de la campagne, une campagne que bien des gens considèrent illégale. Bon nombre d'entre nous espèrent que les progrès récents au chapitre des négociations permettront de transférer ou de confier cette question à l'organisme de droit international approprié que sont les Nations Unies.

Dans quelle mesure le Canada participe-t-il aux activités relatives au renseignement? L'unité de renseignement impliquée dans cette erreur tragique est-elle la même que celle qui a fourni des renseignements sur les effets des bombardements de l'OTAN sur l'expulsion des Kosovars albanais, dont 400 000 ont été expulsés depuis le début desdits bombardements?

Le sénateur Graham: L'honorable sénateur Kinsella sait que le Canada ne participera jamais délibérément à des bombardements contre des civils. L'objectif, comme je l'ai déjà dit à plusieurs reprises, est de restaurer la paix dans la région. L'OTAN a énoncé les conditions pour le retour à l'état normal dans les Balkans, à savoir l'arrêt immédiat et vérifiable de la violence et de la répression au Kosovo; le retrait du Kosovo des forces militaires, paramilitaires et de police yougoslaves et serbes; le retour de tous les réfugiés et des personnes déplacées, en toute sécurité et liberté, et le libre accès au Kosovo assuré aux organisations d'aide humanitaire; le déploiement au Kosovo de présences internationales efficaces, civiles et de sécurité, sanctionnées et adoptées par les Nations Unies, qui soient capables de garantir la réalisation des objectifs communs que sont le retour au Kosovo des Kosovars et, enfin, la négociation d'un accord-cadre fournissant une grande autonomie gouvernementale au Kosovo au sein de la République fédérale de Yougoslavie.

Le Canada et d'autres pays poursuivent leurs efforts diplomatiques. L'ex-premier ministre de Russie, M. Tchernomyrdin est à Beijing. Le premier ministre Chrétien s'est entretenu avec nos alliés de l'OTAN pendant le week-end. Il a discuté récemment de la situation avec le président français, M. Chirac. Mon honorable collègue aura également appris par la presse que le ministre des Affaires étrangères, M. Axworthy, est en contact constant avec ses homologues dans tous les pays alliés.

Le conflit en Yougoslavie-L'effet des frappes aériennes sur l'expulsion des réfugiés

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, est-ce que les services de renseignement, du Canada ou de l'OTAN, avaient prévu, avant le début des bombardements, qu'ils entraîneraient l'expulsion massive des Kosovars albanais du Kosovo?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): L'expulsion des Kosovars, honorables sénateurs, n'est pas le résultat des bombardements de l'OTAN. C'est le résultat des mesures honteuses prises par M. Milosevic.

Nous avons parlé de l'expulsion de près d'un million de personnes qui ont dû quitter le Kosovo et se réfugier dans d'autres pays, où elles sont abritées dans des conditions plutôt inconfortables. Le Canada s'est engagé à accueillir au moins 5 000 réfugiés, et sans doute plus; 1 700 d'entre eux sont déjà arrivés sur notre sol.

Le conflit en Yougoslavie-Le bombardement de l'ambassade de Chine-La fiabilité du renseignement de sécurité

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, le Canada a-t-il analysé de manière indépendante la question de savoir si les informations du renseignement de sécurité étaient justes et suffisantes, ou nous fions-nous uniquement aux Américains, qui semblent tout diriger?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Comme les honorables sénateurs le savent, nous avons notre propre service de renseignement de sécurité. Ce dernier est en fonction tous les jours. Cependant, je ne suis pas au courant des détails, et il ne convient d'ailleurs pas que je fasse des observations à cet égard en ce moment.

Le sénateur Andreychuk: Compte tenu du bombardement de l'ambassade de Chine, le Canada a-t-il institué un examen pour veiller à ce que les renseignements les plus pertinents soient recueillis et que ce malheureux incident ne se répète pas?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je ne puis garantir qu'il n'y aura pas d'autres incidents semblables. Cependant, je peux garantir que le personnel responsable du service de renseignement de sécurité au sein des forces armées prend toutes les mesures possibles pour éviter un autre incident malheureux.

Le conflit en Yougoslavie-L'embargo dans la mer Adriatique-Demande de renseignements à jour

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, tout est sûr maintenant. Le sénateur et moi avons l'intention d'aller en mer pour protéger tout le monde, mais que l'hélicoptère est en panne et ne peut même pas décoller.

Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et a trait à un éventuel embargo dans la mer Adriatique. Peut-il nous donner des éclaircissements à ce sujet?

Parallèlement, s'il possède les renseignements voulus, peut-il nous dire si la force permanente de l'OTAN dans l'Atlantique va y participer? Le cas échéant, la force a-t-elle quitté la côte de l'Europe pour se rendre dans la mer Méditerranée ou dans la mer Adriatique située tout près?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je crois comprendre que les forces font route vers la mer Adriatique. Aucune décision finale n'a été prise au sujet des mesures d'interdiction, qui font présentement l'objet d'un examen.

Le sénateur Forrestall: Voulez-vous dire que la question fait l'objet d'un examen de la part de l'OTAN? Qui prendra la décision une fois l'examen terminé?

Le sénateur Graham: L'examen est mené par l'OTAN. Comme le sait l'honorable sénateur, le Canada jouera un rôle de premier plan si jamais des mesures d'interdiction sont mises en place.

Le Service correctionnel

L'examen des dispositions concernant les libérations conditionnelles et les libÉrations d'office-La position du gouvernement

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et a trait à la libération des prisonniers incarcérés dans les prisons fédérales.

Le leader se rappellera que je lui ai posé, il y a plusieurs semaines, une série de questions concernant le système de contingentement moitié-moitié applicable à la libération des prisonniers en Ontario, dont le commissaire Ingstrup a recommandé la mise en oeuvre d'ici l'an 2000. À cette occasion, j'ai dit craindre qu'une telle ouverture des installations de correction du gouvernement fédéral puisse poser une sérieuse menace au bien-être et à la sécurité des gens respectueux de la loi.

Au cours des dernières semaines, nous avons pris connaissance d'une série d'évasions et de violations des conditions de libération conditionnelle qui ont été largement médiatisées. Il y en a eu quatre dans les deux derniers mois. Plusieurs des contrevenants étaient dangereux et violents et voyageaient sans accompagnement dans des autobus civils. On ne peut que souhaiter que ces contrevenants ne s'en prennent pas de nouveau à de bons citoyens respectueux de la loi.

Le Ottawa Citizen d'aujourd'hui renferme un article troublant sur le même sujet. La manchette dit: «Critiques contre la libération conditionnelle. On demande un examen à la suite d'une série d'évasions.»

L'auteur de l'article, Tim Naumetz, écrit:

Selon un député libéral de premier plan, le gouvernement pourrait revoir les dispositions sur la libération d'office qui accordent une libération conditionnelle automatique aux détenus de pénitenciers fédéraux qui ont purgé les deux tiers de leur peine.

La question sera probablement étudiée dans le cadre d'un examen parlementaire global du Service correctionnel du Canada et des dispositions sur la libération conditionnelle et pourrait faire partie du nouveau programme du gouvernement pour l'automne, a déclaré John Maloney, président du comité de la justice de la Chambre des communes.

Le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous éclairer au sujet de cette déclaration de son collègue de l'autre endroit?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il est vrai que le gouvernement songe à adopter une mesure législative à cet effet. Cependant, je ne pourrais confirmer que la Commission nationale des libérations conditionnelles a un système de quotas.

Le sénateur Oliver: Le gouvernement est-il d'avis que les détenus des pénitenciers fédéraux qui peuvent être dangereux ou violents devraient profiter d'un droit légal accru à une libération conditionnelle anticipée?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, comme je l'ai dit, le gouvernement du Canada doit entreprendre un examen de la question. Je prévois qu'un projet de loi sera présenté à l'automne.

Le sénateur Oliver: Puisque le gouvernement entreprend un examen de la question, le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous dire quel est le mal que cet examen devrait corriger? Quel est le problème?

Le sénateur Graham: Si l'honorable sénateur Oliver a lu les journaux, il est au courant du problème. Toute libération d'un détenu comporte des dangers inhérents. Cependant, le gouvernement croit à la réadaptation. Nous pourrons, je l'espère, améliorer les programmes en place. Je sais que le gouvernement étudie diverses mesures. Il fera bientôt des annonces et présentera des mesures très positives pour le système juridique, comme la justice réparatrice, par exemple.

La justice

La garde et le droit de visite des enfants-La réponse du gouvernement au rapport du comité mixte spécial-La possibilité d'un retard dans la présentation de la mesure habilitante

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je remarque que le gouvernement a répondu au comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants. Dans l'ensemble, la réponse renferme des principes très valables auxquels la plupart des Canadiens souscrivent, selon moi.

Comme on le dit souvent, le problème réside dans les détails. Le leader du gouvernement pourrait-il nous préciser pourquoi il faudra trois ans pour étudier à nouveau cette question que le comité mixte a déjà examinée? La plupart des Canadiens sont bien au courant de l'étude. Des comités fédéraux, provinciaux et ministériels étudient cette question quant aux tribunaux de la famille et à l'administration de la famille depuis de nombreuses années. Pourquoi allons-nous retarder de trois ans une mesure que les Canadiens souhaitent immédiatement, alors que les travaux préparatoires ont déjà été effectués?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Tout d'abord, honorables sénateurs, je voudrais à nouveau féliciter tous les membres du comité qui ont participé aux travaux du comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants. Je crois que les honorables sénateurs peuvent être fiers du rôle qu'ils ont joué dans cette étude.

Mon honorable collègue a peut-être répondu à sa propre question. Ce sont les détails qui posent des problèmes. J'ai eu des entretiens avec la ministre de la Justice, qui est satisfaite du rapport du comité mixte. Entre-temps, des discussions se poursuivront.

Je pense qu'il convient que la ministre ne tire pas de conclusions hâtives sans un débat approprié dans les deux Chambres du Parlement et, chose certaine, avec les provinces qui s'intéressent particulièrement à cette question.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, le rapport du comité mixte représentait certes le débat au Parlement. Je sais qu'il y a des discussions en cours avec les provinces. Tant que nous n'aurons pas une mesure législative, nous ne pourrons nous pencher sur les détails. La plupart des Canadiens sont d'accord avec les principes.

Le leader du gouvernement pourrait-il me dire quel avantage possible il pourrait y avoir à examiner ces questions à nouveau de façon générale, si ce n'est de mettre à nouveau au premier plan deux camps opposés lorsque les questions soulèveront des débats plus animés, ce qui ne pourra que nuire aux enfants? Pourquoi ne négocions-nous pas le projet de loi pertinent avec les provinces? Je ne crois pas, et je doute que le leader croie qu'il faudra trois années pour ce faire.

Le sénateur Graham: Connaissant la ministre de la Justice, je pense que ces discussions se poursuivent toujours. Madame la ministre de la Justice s'occupe activement d'un certain nombre de dossiers. Elle n'est pas du genre qui remet à plus tard, mais elle ne bâcle pas non plus. Je suis sûr que, si elle pouvait abréger le délai de trois ans, elle le ferait. Je porterai certainement les arguments du sénateur Andreychuk à l'attention de la ministre de la Justice.

L'honorable Mabel M. DeWare: Honorables sénateurs, nous étions très excités, vendredi dernier, quand nous avons eu l'impression que la ministre allait présenter rapidement un projet de loi sur la garde et le droit de visite. Tous ceux qui ont siégé au comité sur la garde et le droit de visite ont entendu les témoins raconter leurs pénibles expériences et certaines tragédies qui ont séparé leur famille. Nous savons qu'il faut que le gouvernement bouge rapidement. Il n'y a pas que durant notre étude, mais aussi durant le débat sur la Loi sur le divorce que ces questions ont été soulevées. Cela signifie que la ministre sait depuis maintenant plus de trois ans qu'il y a un problème dans ce domaine et qu'il faut s'y attaquer.

Un article sur le sujet paru dans le National Post d'aujourd'hui disait notamment:

Karen Celica, avocate en droit de la famille de Belleville, en Ontario, affirme que, même si les changements concernant la garde partagée seraient les bienvenus, un retard à cet égard ne fera pas une grande différence.

Un retard fera une grosse différence si des parents sont séparés de leur famille parce qu'ils ont été accusés injustement et qu'ils sont reconnus non coupables deux ans plus tard. Quand un parent n'a pas vu depuis deux ans son enfant de deux ou trois ans, quelle sorte de relation peut-il avoir avec lui par la suite? La question est importante, monsieur le ministre.

(1450)

Je rappelle aux sénateurs que les ministres des gouvernements du Canada ont des réunions ministérielles chaque année. J'ai été du nombre. Il n'y a aucune raison pour que le ministre n'ait pas pu rédiger une mesure législative et la présenter à ses homologues plus tôt, et que tout cela soit fait en une année. La consultation externe a eu lieu.

Je demanderai au leader du gouvernement d'encourager la ministre de la Justice à procéder avec rapidité dans ce dossier. C'est très important.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, rétrospectivement, j'aimerais reconnaître la contribution du sénateur DeWare durant sa présidence au comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, alors que les modifications à la Loi sur le divorce étaient examinées. J'aimerais également reconnaître la contribution des honorables sénateurs qui étaient membres du comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants. J'attirerai l'attention de la ministre de la Justice et de mes collègues au sein du Cabinet sur les doléances et les préoccupations convenablement présentées par les sénateurs DeWare et Andreychuk.

Le revenu national

L'impôt sur le revenu-Les effets de l'inflation sur les changements dans les tranches d'imposition

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle a trait à la non-indexation des tranches d'imposition, processus par lequel l'inflation pousse les Canadiens dans des tranches d'imposition plus élevées. Peu de gens jugeraient que des Canadiens dont le revenu se situe au bas de la tranche de 30 000 $ sont riches. Pourtant, le deuxième niveau du régime fiscal fédéral, c'est-à-dire la tranche d'imposition de 26 p. 100, s'applique aux revenus de seulement 29 950 $.

Le leader du gouvernement peut-il confirmer que le revenu minimal de cette tranche d'imposition devrait passer à 32 650 $ pour compenser l'inflation que nous connaissons depuis les élections fédérales de 1993?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme je l'ai déjà dit, j'ai oublié d'apporter mon ordinateur, mais je serai heureux d'essayer de faire les calculs et de vous donner une réponse plus complète.

Le sénateur Stratton: J'espère que l'ordinateur du gouvernement arrivera au même résultat que nous.

Le leader du gouvernement confirmera-t-il également que les Canadiens dont le revenu imposable se chiffre à seulement 32 650 $ verseront cette année au titre de l'impôt fédéral 243 $ de plus que si le gouvernement s'était contenté d'ajuster les tranches d'imposition pour tenir compte de l'augmentation du coût de la vie depuis 1993?

Enfin, si on ajoute les impôts provinciaux, ce montant de 243 $ passe à une somme variant entre 340 $ et 380 $, soit l'équivalent de deux jours de paie.

Le sénateur Graham: Une fois encore, honorables sénateurs, je devrai aller consulter mon ordinateur, mais l'honorable sénateur n'est pas sans savoir que les budgets de 1998 et 1999 ont consenti des allégements fiscaux pour un montant global de 3,9 milliards de dollars. En 1999-2000, les allégements fiscaux seront de l'ordre de 6 milliards de dollars. Au cours de l'exercice 2000-2001, le montant des allégements fiscaux se chiffrera à 6,6 milliards de dollars. Le total prévu pour les trois années s'élève à 16,5 milliards de dollars. Tous les Canadiens verront que les allégements fiscaux résultent du fait que le gouvernement a réussi à équilibrer ses budgets. En effet, ses livres indiquent un excédent de 3,5 milliards de dollars pour l'an dernier.

Le gouvernement a promis deux autres budgets équilibrés. Nous aurons ainsi droit à quatre budgets équilibrés consécutifs. Ce sera la première fois depuis la Confédération qu'un gouvernement parvient à faire profiter notre économie d'un résultat aussi positif.

Le sénateur Kinsella: Grâce au libre-échange.

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, le leader a insisté sur le fait que tout cela, c'est grâce à son gouvernement. Je pensais qu'il avait admis la semaine dernière que c'était grâce aux Canadiens, non pas au gouvernement, que c'étaient les Canadiens qui en avaient payé le prix et qui avaient fait les sacrifices nécessaires.

Le sénateur Graham: Le sénateur Stratton a encore raison. Les Canadiens ont accompli cela ensemble, sous un gouvernement libéral.

Le sénateur Stratton: Il a fallu 41 milliards de dollars de recettes supplémentaires.

[Français]

L'Industrie

La protection des renseignements personnels-Les imperfections du projet de loi-La position du gouvernement

L'honorable Jean-Claude Rivest: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Elle a trait au projet de loi C-54 sur la protection des renseignements personnels. Le projet de loi n'est pas encore parvenu au Sénat. Je tiens à alerter le leader du gouvernement au Sénat. Le projet de loi proposé par le ministre Manley n'assure pas la protection des renseignements personnels que les entreprises commerciales peuvent fournir et il ne contient, sauf les exceptions spécifiques prévues au projet de loi, qu'un pouvoir de recommandation. Le commissaire n'a qu'un pouvoir de recommandation.

Honorables sénateurs, il existe au Québec et dans d'autres provinces canadiennes des lois de protection des renseignements personnels qui sont exécutoires par les tribunaux sans aucune exception. Je voudrais que le ministre s'informe auprès de ses collègues du Cabinet pour sensibiliser les sénateurs au fait que ce projet de loi du ministre Manley est loin d'être une protection des renseignements personnels au Canada et qu'il pourrait constituer un recul et, dans des cas très évidents, mettre en danger la protection des renseignements personnels des Canadiens.

[Traduction]

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur Rivest soulève un point intéressant sur lequel je me ferai un plaisir d'attirer l'attention du ministre Manley, qui est directement responsable de ce projet de loi. Nous nous attendons à recevoir ce projet de loi peu de temps après notre retour de congé. Les honorables sénateurs auront alors la possibilité d'en débattre à la Chambre et en comité.

Entre-temps, je promets à l'honorable sénateur d'attirer dès aujourd'hui l'attention du ministre Manley sur ses préoccupations.


Le programme d'échange de pages avec la Chambre des communes

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'aimerais présenter les pages qui se trouvent parmi nous cette semaine dans le cadre du programme d'échange de pages avec la Chambre des communes.

À ma gauche, se trouve Caitlin Carlson, de Victoria, en Colombie-Britannique. Caitlin est inscrite à l'Université Carleton, à la faculté des affaires publiques et de gestion. Elle se spécialise en journalisme.

[Français]

Laura Travelbea est originaire de Brentwood Bay en Colombie-Britannique. Elle est inscrite à la faculté des arts de l'Université d'Ottawa. Pour ceux d'entre vous qui n'ont pas eu le plaisir de visiter Brentwood Bay, je vous mentionne que c'est un très joli village sur l'île de Vancouver.

Je vous souhaite la bienvenue au Sénat de la part de tous les honorables sénateurs.


ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur l'extradition

Troisième lecture-Motions d'amendement-Recours au Règlement-Déclaration de la Présidence

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Bryden, appuyée par l'honorable sénateur Pearson, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-40, Loi concernant l'extradition, modifiant la Loi sur la preuve du Canada, le Code criminel, la Loi sur l'immigration et la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle, et modifiant ou abrogeant d'autres lois en conséquence;

Et sur les motions d'amendement de l'honorable sénateur Grafstein, appuyées par l'honorable sénateur Joyal, c.p., que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié,

1. à l'article 44:

a) par substitution, à la ligne 30, à la page 17, de ce qui suit:

«b) soit les actes à l'origine de la demande d'extradition sont sanctionnés par la peine capitale en vertu du droit applicable par le partenaire;

c) soit la demande d'extradition est présen-»;

b) par substitution, aux lignes 1 à 5, à la page 18, de ce qui suit:

«(2) Malgré l'alinéa (1)b), le ministre peut prendre un arrêté de remise lorsque le partenaire qui demande l'extradition lui donne l'assurance que la peine capitale ne sera pas imposée ou, si elle est imposée, ne sera pas exécutée, et qu'il est satisfait de l'assurance qu'on lui a donnée.».

2. à l'article 2 et nouvelle partie 3:

a) par substitution, au terme «accord», de «accord général d'extradition»;

b) par substitution, à l'expression «accord spécifique», de «accord spécifique d'extradition»

c) à l'article 2:

(i) à la page 2, par adjonction, après la ligne 8, de ce qui suit:

««extradition» Livraison d'une personne à un État aux termes d'un accord général d'extradition ou d'un accord spécifique d'extradition.»,
(ii) à la page 1, par suppression des lignes 7 à 10;
(iii) à la page 2, par substitution, à la ligne 13, de ce qui suit:

««partenaire» État qui est soit partie»;

(iv) à la page 1, par adjonction, après la ligne 10, de ce qui suit:

«accord général d'extradition» Accord en vigueur auquel le Canada est partie, qui porte en tout ou en partie sur l'extradition, à l'exception de tout accord spécifique d'extradition.

«accord général de remise» Accord en vigueur auquel le Canada est partie, qui porte en tout ou en partie sur la remise à un tribunal international, à l'exception de tout accord spécifique d'extradition.»,

(v) à la page 1, par substitution, aux lignes 11 et 12, de ce qui suit:

«accord spécifique d'extradition» Accord visé à l'article 10 qui est en vigueur.

«accord spécifique de remise» Accord visé à l'article 10, tel qu'il est modifié par l'article 77, qui est en vigueur.»,

(vi) à la page 2, par substitution, aux lignes 7 et 8, de «b) un territoire.»; à la page 2, par adjonction, après la ligne 16, de ««partenaire judiciaire» Tribunal international dont le nom figure à l'annexe.»; et à la page 2, par adjonction, après la ligne 8, de ««remise à un tribunal international» Le fait de livrer une personne à un tribunal international dont le nom figure à l'annexe.»;

d) à la page 32, par adjonction, après la ligne 4, de ce qui suit:

«PARTIE 3

REMISE À UN TRIBUNAL INTERNATIONAL

77. Les articles 4 à 43, 49 à 58 et 60 à 76 s'appliquent à la présente partie, à l'exception de l'alinéa 12a), du paragraphe 15(2), de l'alinéa 15(3)c), des paragraphes 29(5), 40(3), 40(4) et de l'alinéa 54b):

a) comme si le terme «extradition» se lisait «remise à un tribunal international»;

b) comme si l'expression «accord général d'extradition» se lisait «accord général de remise»;

c) comme si l'expression «partenaire» se lisait «partenaire judiciaire»;

d) comme si l'expression «accord spécifique d'extradition» se lisait «accord spécifique de remise»;

e) comme si l'expression «État ou entité» se lisait «tribunal international»;

f) avec le modifications prévues à l'article 78 à 82;

g) avec les autres modifications exigées par les circonstances.

78. Pour l'application de la présente partie, l'article 9 est réputé se lire comme suit:

«9. (1) Les tribunaux internationaux dont les noms apparaissent à l'annexe sont désignés partenaires judiciaires.

(2) Le ministre des Affaires étrangères peut par arrêté, avec l'accord du ministre, radier tout nom de l'annexe ou y ajouter d'autres noms de tribunaux internationaux.»

79. Pour l'application de la présente partie, le paragraphe 15(1) est réputé se lire comme suit:

«15. (1) Le ministre peut, après réception de la demande de remise à un tribunal international, prendre un arrêté introductif d'instance autorisant le procureur général à demander au tribunal, au nom du partenaire judiciaire, la délivrance de l'ordonnance d'incarcération prévue à l'article 29.»

80. Pour l'application de la présente partie, les paragraphes 29(1) et (2) sont réputés se lire comme suit:

«29. (1) Le juge ordonne dans les cas suivants l'incarcération de l'intéressé jusqu'à sa remise:

a) si la personne est recherchée pour subir son procès et le juge est convaincu que la personne qui comparaît est celle qui est recherchée par le partenaire judiciaire;

b) si la personne est recherchée pour se faire infliger une peine ou pour la purger et le juge est convaincu qu'elle est celle mentionnée dans l'arrêté.

(2) L'ordonnance d'incarcération indique le nom de l'intéressé, le lieu où il sera détenu et le nom du partenaire judiciaire.»

«a) soit accueillir l'appel, au motif, selon le cas:»

81. Pour l'application de la présente partie, la partie de l'alinéa 53a) qui précède le sous-alinéa (i) est réputée se lire comme suit:

82. Pour l'application de la présente partie, l'alinéa 58b) est réputé se lire comme suit:

«b) soit la désignation de l'infraction à l'origine de la demande de remise;»

e) par le changement de la désignation numérique de la partie 3 à celle de partie V et des articles 77 à 130 à celle d'articles 83 à 136;

f) par le changement de tous les renvois qui en découlent.»

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Kinsella, appuyée par l'honorable sénateur DeWare, que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, ainsi que les propositions d'amendement, pour une étude plus approfondie.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant de procéder au débat de cet article, vous vous souviendrez de la question soulevée d'abord par le sénateur Grafstein et du rappel au Règlement du sénateur Bolduc.

Le mercredi 14 avril, pendant le débat sur le projet de loi C-40 à l'étape de la troisième lecture, le sénateur Grafstein est intervenu pour expliquer plusieurs amendements qu'il entendait proposer. Les amendements en question n'étaient alors libellés qu'en anglais. Par ailleurs, en exposant les raisons des amendements, le sénateur Grafstein a fait allusion à la juge Louise Arbour, une Canadienne qui est actuellement procureur du Tribunal international sur les crimes de guerre de La Haye.

À cause de l'absence d'un libellé français pour les amendements et des allusions à Mme Arbour, le sénateur Bolduc a fait un rappel au Règlement. Il a protesté contre le fait que les motions d'amendement proposées étaient unilingues, et il a dit qu'il ne convenait pas de solliciter l'avis d'un juge sur une mesure d'intérêt public, en l'occurrence la politique en matière d'extradition.

[Traduction]

Réagissant immédiatement à la deuxième objection du sénateur Bolduc, le sénateur Grafstein a admis qu'il avait lui-même des réserves quant à son initiative de demander l'opinion de Mme Arbour sur le projet de loi C-40. Il a dit que le sénateur Bolduc avait soulevé une objection valide, et il a accepté de retirer ses références à l'avis de Mme Arbour.

(1500)

Malgré tout, le sénateur Bolduc a demandé à la présidence de rendre une décision. Plusieurs sénateurs sont intervenus pour appuyer cette position, et le sénateur Prud'homme a signalé qu'on pouvait utiliser le temps additionnel afin de préparer les amendements dans les deux langues officielles. Le sénateur Grafstein a ensuite admis qu'il avait lui-même hésité à présenter ses amendements dans une seule langue. Il l'a fait, a-t-il dit, parce qu'il craignait qu'on n'adopte le projet de loi C-40 sans qu'il ait pu expliquer sa position concernant la version actuelle.

Peu de temps après, j'ai dit que j'acceptais d'examiner les questions faisant l'objet du rappel au Règlement, et il a été convenu d'ajourner le débat sur le projet de loi.

[Français]

Le jour suivant, le jeudi 15 avril, lorsque le projet de loi C-40 a été mis en délibération, j'ai proposé qu'on autorise la poursuite du débat. J'ai fait cette proposition compte tenu du fait que les amendements du sénateur Grafstein étaient maintenant dans les deux langues officielles et parce que ce dernier avait retiré toutes les allusions à Mme Arbour. Par la même occasion, j'ai indiqué que je ferais une déclaration sur les deux objections du sénateur Bolduc après avoir étudié la chose plus en détail. Le sénateur Grafstein a proposé son amendement dans les formes, et on a poursuivi le débat.

Ayant eu l'occasion d'examiner le dossier de plus près, je suis maintenant prêt à rendre une décision sur les questions soulevées par le rappel du Règlement.

Je vais commencer par la question de savoir s'il est obligatoire de présenter les motions, interpellations et amendements au Sénat dans les deux langues officielles du pays. Le Règlement du Sénat reste muet à cet égard, et c'est également le cas pour l'autre endroit. À la page 177 de la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, 6e édition, commentaire 552(3), on indique seulement qu'une motion doit avoir été présentée par écrit au Président, dans l'une ou l'autre langue officielle, avant que la Chambre n'en soit saisie.

[Traduction]

Au Sénat, la présentation des motions et interpellations dans une seule langue crée rarement des difficultés parce que, en règle générale, le débat à leur sujet n'a pas lieu avant l'écoulement d'une période d'avis d'un ou deux jours. Lorsqu'elles sont mises en délibération, elles sont immanquablement disponibles dans les deux langues, car elles ont paru dans le Feuilleton et le Feuilleton des avis.

La situation est quelque peu différente dans le cas des amendements, y compris ceux qui portent sur le contenu des projets de loi à l'étape du rapport et à la troisième lecture. Ces amendements étant habituellement proposés sans avis, rien n'empêche un sénateur de les présenter dans une seule langue pour examen immédiat. Dans le cas du sénateur Grafstein, le manque de temps et un sentiment d'urgence ne lui ont pas permis de présenter ses amendements dans les deux langues officielles, comme il en avait l'intention.

Une telle situation n'est pas sans précédent. Quelque chose de semblable s'est produit en janvier 1993, pendant le débat sur le projet de loi C-91 modifiant la Loi sur les brevets. On avait alors présenté un amendement long et complexe à l'une des dispositions du projet de loi à l'étape de la troisième lecture. Un sénateur a soulevé une objection parce que l'amendement était unilingue. On a donc proposé que le débat soit suspendu ou ajourné jusqu'à ce que l'amendement soit disponible dans les deux langues. Bien que certains sénateurs aient signalé que les règles et les autorités n'imposent aux sénateurs aucune obligation à cet égard, on a convenu de façon générale de faire préparer les amendements en français et en anglais avant de poursuivre le débat. Le Sénat a donc décidé d'ajourner le débat en question afin de permettre la préparation de l'amendement dans les deux langues.

[Français]

L'incident de 1993 correspond exactement à ce qui s'est produit dans le cas du sénateur Grafstein. En outre, je crois comprendre qu'au sein des comités, on veille à ce que les sénateurs disposent dans les deux langues de tout amendement à un projet de loi avant de prendre une décision. Cela donne à penser qu'abstraction faite des règles et autorités, le Sénat reconnaît l'importance d'avoir les motions, interpellations et amendements dans les deux langues officielles. Lorsque cela n'est pas fait, il semble que le Sénat est disposé à reporter toute décision jusqu'à ce que la question à l'étude soit disponible dans les deux langues. Je crois qu'il s'agit de la bonne façon de procéder.

[Traduction]

En ce qui concerne le deuxième élément du rappel au Règlement du sénateur Bolduc, les allusions au point de vue prêté à madame la juge Arbour, je ne crois pas qu'il existe de réponse simple. Selon le commentaire 493 de Beauchesne, aux pages 150 et 151, il faut marquer de la déférence dans les débats pour les personnes «soustraites aux critiques». Certains interdits sont normalement observés ou appliqués lorsqu'il est question de ces personnes pendant les délibérations. Par exemple, on a de tout temps considéré comme non parlementaires les allusions aux magistrats et aux tribunaux lorsqu'elles revêtaient le caractère d'une attaque personnelle ou d'un blâme. Beauchesne signale également que le Président a toujours interdit les attaques contre des personnes investies de hautes fonctions officielles. De même, le Président demande aux parlementaires de se montrer prudents lorsqu'ils font des déclarations relatives à des personnes qui ne sont pas à la Chambre et qui ne peuvent répliquer directement.

Selon toute apparence, les précautions mentionnées dans Beauchesne ne semblent pas avoir d'incidence immédiate sur la question qui nous intéresse. Les allusions du sénateur Grafstein à Mme Arbour n'étaient certes pas de nature critique ou offensante. De fait, elles donnent à penser que le sénateur n'a pas eu énormément de succès dans ses démarches pour obtenir des renseignements sur le projet de loi auprès du bureau de Mme Arbour. Si je comprends bien, Mme Arbour n'a fait aucune observation concernant le fond du projet de loi. La déclaration qui lui est attribuée ne dénote guère plus qu'une certaine satisfaction devant le fait que le Canada a pris des mesures pour satisfaire à une obligation découlant d'un traité.

[Français]

Un autre point revêt de l'importance en l'espèce, soit que Mme Arbour n'a pas de fait été citée dans le contexte de son poste de juge à la Cour de l'Ontario. Elle a plutôt été mentionnée en rapport avec son rôle actuel de procureur du Tribunal international sur les crimes de guerre, un poste qu'elle occupe après avoir obtenu du Parlement une autorisation d'absence de ses fonctions judiciaires.

Le sénateur Bolduc a aussi expliqué que les allusions aux vues de Mme Arbour étaient inadmissibles parce qu'elles transgressaient les limites existant normalement entre les ministres et leurs fonctionnaires. Il est largement admis que le domaine des politiques relève exclusivement des ministres alors que les fonctionnaires doivent normalement se borner à des déclarations sur les programmes et leur mise en oeuvre. Encore une fois, dans ce cas particulier, je ne suis pas certain que Mme Arbour, en tant que procureur ou même en tant que juge, puisse être considérée comme une fonctionnaire comptable à un ministre, ni qu'on puisse interpréter ses propos comme l'expression injustifiée d'une opinion sur une politique officielle. Je ne pense pas que ce genre d'objection s'applique à la situation qui s'est produite le 14 avril.

[Traduction]

Néanmoins, je comprends bien le point de vue qui a incité le sénateur Bolduc et d'autres à intervenir, notamment en ce qui touche les préoccupations à l'égard de la magistrature. La Constitution et nos lois attribuent des rôles très précis aux assemblées législatives et aux tribunaux. Leur indépendance respective est essentielle au bon fonctionnement de notre gouvernement. Cette indépendance peut être ébranlée si l'on fait dans le cadre des délibérations du Parlement des commentaires déplacés sur les juges et les tribunaux. Il n'y a aucun doute que les parlementaires ont le droit, et peut-être l'obligation, de prendre acte du travail accompli par les tribunaux, mais l'intégrité de ces derniers doit être respectée. La manière dont cela se concrétise relève de notre responsabilité à tous.

Troisième lecture-Motions d'amendement-Report du vote

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, j'interviens sur la motion du sénateur Kinsella visant à renvoyer au comité le projet de loi et les amendements. Selon une impression partagée par des sénateurs d'en face, le vote sur le projet de loi C-40 devait avoir lieu ce soir et le chef de l'opposition aurait même donné son accord la semaine dernière. Je peux affirmer catégoriquement que ce n'est tout simplement pas le cas. Le débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi a été dirigé par les sénateurs libéraux. Quoique importante, notre contribution n'a servi qu'à compléter la leur.

De toute façon, c'est au gouvernement et non à l'opposition de gérer les lois. Toute décision visant à tenir un vote, si elle fait suite à une entente, est rendue publique et le gouvernement règle alors les mesures législatives en conséquence. L'opposition n'est pas du tout en mesure de déterminer une journée de vote qui serait plus avantageuse. De toute façon, quel serait l'avantage de présenter la question sous forme de motion pour en accélérer l'adoption?

Je répète qu'il revient au gouvernement seul de gérer les lois gouvernementales. D'ailleurs, à quelques exceptions près, ceci n'a jamais pu être effectué sans l'entière collaboration des partis d'opposition.

En ce qui a trait à la confusion qui a entouré la tenue possible d'un vote la semaine dernière, je peux assurer à tous mes collègues que nous n'en sommes nullement responsables. Bien que le gouvernement veuille toujours bien sûr traiter l'étude d'un projet de loi avec le plus de célérité possible, pour ce qui est du projet de loi C-40, le gouvernement annonce clairement ses couleurs, sans plus de précisions, alors que nous n'avons jamais, et je dis bien jamais, souligné que nous demanderions la tenue d'un vote au cours d'une journée en particulier.

On a beaucoup parlé du fait que le gouvernement refuse de tenir un vote libre sur le projet de loi C-40. Après tout, ce projet de loi traite de la peine de mort et chaque fois que cette question a été soulevée au Parlement, elle n'a jamais été soumise à la discipline des whips. Les décisions relatives à la peine de mort et à l'avortement, qui sont des questions de vie ou de mort, ne devraient pas être soumises à la discipline de parti, parce que le caucus, comme le Cabinet d'ailleurs, pourrait être divisé sur ces questions de conscience.

Il convient aussi de se rappeler que le Sénat n'a pas besoin de la confiance des sénateurs pour se maintenir. En effet, le rejet d'un projet de loi du gouvernement n'entraîne pas automatiquement la chute du gouvernement. Pourtant, dans le cas qui nous occupe, le gouvernement insiste pour imposer lourdement la discipline de parti à ses partisans au Sénat, les assimilant à leurs collègues élus lorsqu'il s'agit de se plier aux diktats du gouvernement. Paradoxalement, cette rigidité va à l'encontre de la promesse faite dans l'infâme livre rouge de 1993, soit autoriser un plus grand nombre de votes libres à la Chambre des communes. Cette promesse vise par extension le Sénat. Quelle meilleure façon de tenir cette promesse que d'autoriser les sénateurs à voter selon leur conscience sur les amendements qu'a présentés le sénateur Grafstein? Nous, de notre côté, avons tenu plusieurs discussions sur ces amendements et sur le projet de loi lui-même, et nous avons demandé au whip d'autoriser les sénateurs à voter selon leur conscience.

La motion visant à renvoyer le projet de loi à un comité est pleinement justifiée et son parrain, le sénateur Kinsella, l'a bien expliquée. Des questions soulevées lors de la troisième lecture n'ont pu être examinées que d'une façon générale. Les audiences du comité permettraient non seulement de compléter les discussions entamées au Sénat, mais confirmeraient aussi l'importance d'examiner les aspects plus techniques du projet de loi, examen qui, comme le sénateur l'a fait remarquer, ne peut se faire au moment de la troisième lecture.

Le renvoi au comité permettrait aussi d'étudier la participation possible de la juge Louise Arbour à la préparation de ce projet de loi. Cette impression est très marquée. Ce qui est plus troublant encore, si cette impression est fondée, c'est que sa participation constituerait une infraction inacceptable à la convention qui affirme sans équivoque l'indépendance du pouvoir judiciaire.

Permettez-moi de rappeler les faits. Le 14 avril, le sénateur Grafstein a cité le témoignage de la ministre de la Justice, qui avait dit devant le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles:

Le projet de loi C-40 a reçu l'appui de la procureure en chef actuelle, Louise Arbour.

Le sénateur Milne, en sa qualité de présidente du comité, a expliqué que la déclaration de la ministre de la Justice était fondée sur une entrevue accordée par Mme Arbour au Edmonton Journal. Mme Arbour est en congé de son poste à la Cour d'appel de l'Ontario, mais demeure membre à part entière de la magistrature canadienne et est par conséquent tenue d'être indépendante du gouvernement comme ses fonctions l'exigent.

Le projet de loi C-40 a reçu la première lecture et l'ordre d'impression à la Chambre des communes le 5 mai 1998. L'entrevue publiée dans le Edmonton Journal le lendemain avait été accordée par Mme Arbour à partir de Canberra, en Australie. Par conséquent, d'après la déclaration de la ministre de la Justice et d'après ce qu'aurait dit Mme Arbour en Australie, moins de 24 heures après la première lecture du projet de loi et sans diffusion publique de celui-ci, il semble que Mme Arbour connaissait la teneur de ce projet de loi avant que celui-ci ne soit déposé à la Chambre des communes. Elle a donc fort bien pu être consultée lors de l'élaboration et de la rédaction du projet de loi.

Il convient certes de profiter de son expérience à titre de procureur spécial. Cependant, quoique en congé à l'heure actuelle, elle siège à la Cour d'appel de l'Ontario, qui pourrait un jour être appelée à se prononcer sur une cause découlant du projet de loi C-40. Elle pourrait même devoir se prononcer sur la constitutionnalité du projet de loi, qui pourrait bien faire l'objet d'une contestation en vertu de la Charte des droits et libertés. Elle est constamment nommée comme une des candidates favorites à la Cour suprême, ce qui devrait la sensibiliser davantage à son obligation de garder ses distances par rapport à quiconque - ministre ou sénateur - chercherait à obtenir un avis sur des mesures législatives proposées ou en vigueur.

Le comité doit demander à la ministre de la Justice si et dans quelle mesure Mme Arbour a participé à la rédaction du projet de loi C-40. Je suis inquiet du fait que les hauts fonctionnaires de la ministre, qui ne sont certes pas indifférents au débat qui a cours ici depuis quelques semaines, n'ont toujours pas clarifié la chose. Ils risquent ainsi de confirmer les soupçons de certains, ce qui serait absolument injuste pour la juge Arbour si jamais ces soupçons sont non fondés.

Le renvoi de la motion au comité permettra non seulement d'évaluer les amendements du sénateur Grafstein, mais aussi, espérons-le, de clarifier la contribution de Mme la juge Arbour à la rédaction du projet de loi, projet de loi dont elle risque d'être saisie en tant que magistrat s'il est jamais adopté. En soi, honorables sénateurs, cela justifie le renvoi du projet de loi C-40 au comité, et c'est pourquoi j'appuie entièrement la motion du sénateur Kinsella.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le vote porte sur la motion d'amendement du sénateur Kinsella. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et deux sénateurs s'étant levés:

Son Honneur le Président: Convoquez les sénateurs.

Les whips auraient-ils l'obligeance de me dire combien de temps ils voudraient que le timbre se fasse entendre?

L'honorable Mabel M. DeWare: Conformément au paragraphe 67(1) du Règlement, je propose: Que le vote par assis et debout soit reporté à demain.

Son Honneur le Président: Le vote aura donc lieu demain à 17 h 30, conformément au Règlement.

[Français]

L'honorable Léonce Mercier: Honorables sénateurs, il serait préférable que le vote soit différé à 15 heures, demain après-midi.

[Traduction]

Le sénateur DeWare: D'accord.

Son Honneur le Président: Est-on d'accord pour que le vote ait lieu à 15 heures demain?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Le timbre se fera donc entendre demain, à 14 h 45, et le vote aura lieu à 15 heures.

[Français]

La Loi nationale sur l'habitation
La Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture

L'honorable Aurélien Gill propose: Que le projet de loi C-66, Loi modifiant la Loi nationale sur l'habitation et la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement et une autre loi en conséquence, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, j'ai le plaisir de vous parler aujourd'hui du projet de loi C-66, visant à modifier la Loi nationale sur l'habitation et la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement.

Le projet de loi C-66 simplifiera la Loi nationale sur l'habitation en éliminant les restrictions inutiles et en autorisant la Société canadienne d'hypothèques et de logement à réagir rapidement aux besoins des Canadiens et aux possibilités qu'offre le marché. Ces modifications permettront à la Société canadienne d'hypothèques et de logement de lancer de nouveaux produits de financement de l'habitation, d'encourager davantage les exportations de produits canadiens de construction d'habitations et d'offrir aux Canadiens un service amélioré et plus efficace.

[Traduction]

Dans mes observations d'aujourd'hui, je voudrais parler de l'engagement du gouvernement à jouer un rôle de premier plan en matière d'habitation. Cela m'aidera à souligner l'importance du projet de loi pour permettre à la SCHL de continuer de faire preuve de leadership.

(1520)

[Français]

La Société canadienne d'hypothèques et de logement a comme objectif fondamental de promouvoir l'accessibilité et le choix en matière de logement. Chacune de ses activités essentielles soutient ce but, que ce soit l'assurance-prêt hypothécaire, l'offre de logements aux Canadiens à faible revenu, la recherche en matière d'habitation ou la promotion des exportations.

L'ajout du mandat de la politique gouvernementale liée au rôle de la SCHL en matière d'habitation est l'un des aspects les plus importants du projet de loi C-66. Ce changement donnera à tous les Canadiens la possibilité d'obtenir du financement hypothécaire au coût le plus faible possible, quel que soit leur lieu de résidence.

Certes, la majorité des Canadiens sont bien logés. La SCHL se doit de continuer à favoriser l'accès à des logements abordables. Cependant, certains ont besoin d'aide additionnelle pour satisfaire leurs besoins de logement. Nous oeuvrons pour que les Canadiens obtiennent le logement qu'il leur faut au moyen de partenariats conclus entre tous les paliers de gouvernement, les organismes communautaires et le secteur privé.

Le gouvernement fédéral injecte chaque année 1,9 milliard de dollars dans le logement social d'un bout à l'autre du pays. Le gouvernement canadien investit également sur une période de cinq ans une somme globale de 300 millions de dollars dans des programmes de rénovation des habitations devant venir en aide aux Canadiens à faible revenu. Ces fonds servent à réparer les logements selon les normes minimales de santé et de sécurité. Ils sont également utilisés pour améliorer les logements destinés aux sans-abri ou aux personnes risquant de perdre leur logement, et pour modifier le logement des personnes handicapées.

D'autres initiatives de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, comme les Solutions maison et le Centre canadien du partenariat public-privé dans l'habitation, sont des projets d'aide à la collectivité favorisant l'offre de logements abordables.

Honorables sénateurs, les Canadiens sont nombreux à posséder leur propre logement grâce à l'assurance-prêt hypothécaire de la SCHL. Dans certains cas, la mise de fonds étant plus faible, ils ont acheté plus rapidement; dans d'autres, ils sont devenus propriétaires, un rêve qu'ils pensaient irréalisable, et sans qu'il en coûte un denier au gouvernement.

L'assurance-prêt hypothécaire permet aux Canadiens d'acheter une maison avec une mise de fonds aussi faible que 5 p. 100. Cette option, qui était accessible seulement aux nouveaux acheteurs, est maintenant offerte à ceux qui n'en sont pas à leur première maison. Grâce à la mise de fonds réduite, le rêve est devenu une réalité pour plus de 610 000 acquéreurs d'une propriété depuis le lancement du programme en 1992. Les sondages que la SCHL a réalisés auprès de la clientèle révèlent que 70 p. 100 de ces acheteurs n'auraient pas pu à l'époque devenir propriétaires sans l'aide de la SCHL.

[Traduction]

Au cours de la dernière année seulement, la SCHL a aidé les Canadiens à se prévaloir d'une assurance-prêt hypothécaire pour avoir ainsi accès à plus de 300 000 propriétés, et ce, sans qu'il en coûte rien au gouvernement. En fait, la politique de la SCHL l'oblige à vendre du financement à long terme directement à partir des primes et des droits qu'elle perçoit.

[Français]

L'assurance-prêt hypothécaire de la SCHL encourage un grand nombre d'options. Elle abaisse le coût du financement de l'habitation et facilite l'obtention de prêts. Elle permet en outre aux emprunteurs de répondre à leurs besoins financiers en utilisant leurs propres ressources.

Le gouvernement fédéral veille à ce que l'assurance hypothécaire soit accessible aux acheteurs de logements de toutes les régions du Canada. Honorables sénateurs, les modifications proposées permettraient à la Société canadienne d'hypothèques et de logement de donner un caractère plus commercial à son programme d'assurance hypothécaire. En garantissant la compétitivité de ce secteur, nous permettrons aux Canadiens et aux Canadiennes d'avoir accès à un plus vaste choix de produits de financement, au plus bas coût possible.

Grâce à une Loi nationale sur l'habitation simplifiée, la SCHL pourra répondre rapidement aux besoins des Canadiens et des Canadiennes, et aux possibilités qui se présentent sur le marché. Les modifications donneraient à la SCHL la possibilité d'offrir de nouveaux produits, comme, entre autres, le prêt hypothécaire inverse, qui permet aux propriétaires-occupants âgés d'utiliser l'avoir propre de leur habitation pour obtenir des fonds, tout en demeurant chez eux.

La SCHL pourrait également mettre en place des modes de financement non hypothécaire dans les régions éloignées où le régime d'enregistrement foncier ne permet pas l'enregistrement d'hypothèques à titre de sûretés. Cela viserait également les mécanismes de financement dans les réserves indiennes, où il existe certaines restrictions quant à la possibilité de se servir de terrains à titre de garantie hypothécaire.

[Traduction]

L'assurance-prêt hypothécaire de la SCHL aide non seulement les Canadiens à accéder à la propriété, mais elle est aussi avantageuse pour les secteurs de la construction domiciliaire et de l'immobilier.

[Français]

Le secteur du logement est essentiel à notre économie. Chaque année, en contribuant à revitaliser les collectivités aux quatre coins du pays, les architectes, les ingénieurs, les urbanistes, les constructeurs d'habitations, les entreprises de rénovation, les agences immobilières et les autres fournisseurs de services créent des milliers d'emplois.

Pour chaque tranche de 100 millions de dollars dépensés dans le secteur de la construction, on crée 1 500 années-personnes de travail, tant directement qu'indirectement. Derrière chaque travailleur de la construction, on trouve de nombreux autres travailleurs qui produisent les madriers, la brique, les plaques de plâtre et autres matériaux nécessaires à la construction de maisons.

Le secteur canadien de l'habitation est un secteur novateur qui a bien servi la population canadienne. C'est pourquoi nous possédons aujourd'hui les produits et les services dont les autres pays ont besoin. La SCHL entend maintenir la pérennité du secteur de l'habitation en faisant connaître son savoir-faire et en aidant le secteur à tirer profit de son potentiel dans le domaine de l'exportation.

En décembre 1997, la Société canadienne d'hypothèques et de logement a créé le Centre canadien d'exportation pour l'habitation. Ce centre travaille en étroite collaboration avec le secteur de l'habitation et avec les autres membres d'Équipe Canada. Il s'efforce de vendre les produits et le savoir-faire canadiens à d'autres pays. En ce moment, il coordonne et facilite la participation d'entreprises du secteur de l'habitation à des missions commerciales à l'étranger et mène un certain nombre d'autres activités de promotion des exportations afin d'accroître nos ventes de produits et de services reliés à l'habitation.

Grâce à cette loi, la SCHL sera mieux à même de promouvoir à l'étranger les produits et les services du secteur canadien de l'habitation. La Société canadienne d'hypothèques et de logement répond ainsi aux membres du secteur qui demandaient l'appui de la SCHL pour créer de nouveaux débouchés. La SCHL pourra aussi aider les Canadiens à vendre leur savoir-faire aux autres pays. Les entrepreneurs canadiens pourront solliciter l'appui de la SCHL pour la promotion de leurs projets à l'étranger. Tout cela créera des emplois pour les Canadiens et les Canadiennes, tant ici qu'ailleurs dans le monde.

La SCHL collabore étroitement avec le secteur de l'habitation, les associations professionnelles et d'autres ministères et organismes du gouvernement fédéral à l'élaboration de stratégies d'exportation. Grâce au projet de loi C-66, la SCHL pourra plus facilement établir des partenariats avec le secteur de l'habitation dans le cadre des projets de marketing à l'étranger.

Le projet de loi C-66 aidera la SCHL a répondre à la demande croissante de renseignements commerciaux. Il permettra aux Canadiens et aux Canadiennes de tirer profit de la mondialisation des marchés, pour le bénéfice des secteurs privé et public.

Le Canada est reconnu dans le monde entier pour la haute qualité de ses habitations. Si notre pays jouit de cette réputation aujourd'hui, c'est en partie parce que la SCHL a appuyé sans relâche les activités de recherche qui se sont traduites par l'enrichissement des connaissances en habitation, par de meilleurs procédés de construction et par des logements de meilleure qualité. Au fil des ans, la SCHL a encouragé la conception et la démonstration de nouveaux modèles de logements écologiques, flexibles, accessibles et adaptables. La SCHL a également consulté des groupes, tels les personnes âgées, les personnes handicapées et les jeunes dans toutes les régions du pays, afin de cerner leurs besoins et de leur offrir un plus grand choix de logements.

Honorables sénateurs, depuis près de 55 ans, la Société canadienne d'hypothèques et de logement joue un rôle primordial dans le développement de notre pays. Grâce à son aide, des millions de Canadiens et de Canadiennes ont pu devenir propriétaires ou se procurer un logement locatif convenable. Les réalisations de la SCHL représentent des avantages énormes pour le Canada et, en fait, pour un grand nombre de nos familles et de nos collectivités.

Par le projet de loi C-66, nous voulons faire en sorte que les générations futures puissent profiter des mêmes avantages que les précédentes en ce qui a trait à l'aide du gouvernement. Pour atteindre cet objectif, la SCHL doit pouvoir continuer d'offrir son programme d'asssurance-prêt hypothécaire et de mener d'autres initiatives qui rendent les logements plus abordables et plus accessibles au Canada.

J'invite tous les sénateurs à appuyer les modifications proposées à la Loi nationale sur l'habitation et à la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement afin que la SCHL puisse continuer d'aider les Canadiens à se loger. Depuis plus de 50 ans, la SCHL est vraiment au coeur de l'habitation.

L'honorable Normand Grimard: Honorables sénateurs, la possibilité de se trouver un logement convenable demeure un rêve hors de portée pour un nombre considérable de Canadiens.

À l'heure actuelle, quelque 2,8 millions de ménages canadiens consacrent au logement plus de 30 p. 100 de leur revenu avant impôt. Cela inclut environ 1,7 million de ménages locataires, c'est-à-dire deux locataires sur cinq.

Dans les deux premières villes en importance au Canada, jusqu'à 10 000 personnes dorment chaque nuit dans des refuges, y compris 6 000 à Montréal et 4 000 à Toronto. Le nombre de sans-abri augmente constamment. Seule une action concertée de la part de tous les paliers de gouvernement réussira à venir à bout de ce problème.

Il y a quelques mois, à la veille d'un sommet sur les sans-abri qui se tenait à Toronto, le premier ministre a confié le dossier des sans-abri à la ministre du Travail, sans toutefois lui donner aucun des outils qui lui permettrait d'agir. Ainsi sera-t-on surpris surprendra-t-on d'apprendre que la ministre a refusé d'assister à une réunion au sommet, réunion que l'on avait fixée au 30 avril, à Regina.

[Traduction]

(1530)

Honorables sénateurs, le projet de loi C-66 propose des modifications aux dispositions législatives fédérales en matière d'habitation qui, au dire du gouvernement, sont les plus importantes à être apportées depuis 1985. Le projet de loi C-66 vise effectivement de nombreux aspects du mandat de la SCHL, y compris des modifications qui lui permettront d'étendre ses activités en matière d'assurance hypothécaire et qui lui conféreront des pouvoirs particuliers pour son programme de recherches sur le logement ainsi que plus de souplesse dans l'administration des programmes de logement social et davantage de pouvoirs pour conclure des partenariats avec le secteur privé.

Bon nombre de ces mesures sont des modifications de forme ou visent à renforcer les activités commerciales de la SCHL. Certaines sont assez positives, à tout le moins positives pour les activités commerciales de la SCHL. La plupart ne contribuent pas ou pratiquement pas à résoudre la pénurie de logements abordables à l'échelle nationale ou le problème des sans-abri au Canada. Ce projet de loi n'aura pas beaucoup de répercussions, d'une façon ou d'une autre, sur la vie de ceux qui luttent pour trouver un logement abordable.

[Français]

Je voudrais aujourd'hui attirer l'attention du Sénat sur trois aspects de ce projet de loi qui méritent un second examen objectif en comité.

Tout d'abord, il habilitera le gouvernement à soutirer 200 millions de dollars à la Société canadienne d'hypothèques et de logement sur une période de 5 ans commençant en 1997. C'est que la SCHL devra verser au gouvernement une compensation en contrepartie de la garantie fédérale accordée à ses activités d'assurance. Cette compensation, qui n'est ni plus ni moins qu'un type de frais d'utilisation, passera de 11,5 millions de dollars en 1997 à 51 millions de dollars par année en 2002.

Ne serait-il pas préférable que la somme de 200 millions soit affectée au budget du logement pour les personnes à faible revenu, tout comme l'a proposé le porte-parole de mon parti dans l'autre Chambre?

Le projet de loi C-66 propose de remplacer trois fonctionnaires qui siègent au conseil d'administration de la SCHL par des nominations politiques. Est-il toutefois souhaitable de remplacer trois personnes possédant une vaste expérience dans le domaine de l'habitation par trois autres dont les connaissances en logement social ou en assurance hypothécaire risquent d'être minimes, voire même inexistantes?

La firme GE Capital, qui offre elle aussi des garanties hypothécaires, s'inquiète de ce que la SCHL, grâce au projet de loi C-66, continuera de jouir d'un avantage concurrentiel inéquitable.

(1540)

Selon cette firme, bien que le projet de loi C-66 se propose d'uniformiser les règles du jeu, il ne va réellement pas assez loin. Par exemple, tandis que la Couronne appuie intégralement la SCHL, la firme GE Capital voit ses activités garanties à 90 p. 100 seulement. La firme est d'avis que la compensation qui serait versée par la SCHL au gouvernement est nettement insuffisante. Elle ajoute que le projet de loi permet à la SCHL d'obtenir de la réassurance en passant outre aux restrictions qui sont imposées au secteur privé.

Je crois que le comité devra tendre l'oreille aux doléances de cette firme. GE Capital pourrait fort bien nous présenter des objections basées sur des arguments convaincants, susceptibles de donner lieu à des amendements au projet de loi C-66.

[Traduction]

En terminant, honorables sénateurs, je vous cite un extrait d'un rapport sur le logement qui, bien que rédigé il y a quelques années, aurait tout aussi bien pu être écrit aujourd'hui:

Le Canada fait face à une importante crise du logement. Au cours des derniers mois, le groupe de travail s'est rendu dans toutes les régions du pays et le message a partout été le même: la situation est critique et une intervention immédiate s'impose afin de corriger le problème. Chaque partie du pays fait face à des difficultés liées au contexte qui lui est propre. Des problèmes de disponibilité, de sans-abri et de nombreux autres ordres soulèvent beaucoup d'angoisse dans le pays. Dans un pays comme le nôtre, il est inacceptable que 1,3 million de ménages vivent dans un logement inadéquat ou soient forcés de consacrer un pourcentage excessivement élevé de leur revenu au loyer.

Honorables sénateurs, c'est un extrait d'un rapport intitulé: «Finding Room: Housing Solutions for the Future», qui a été rédigé en 1990 par M. Paul Martin, à l'époque porte-parole du Parti libéral en matière de logement.

[Français]

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

L'honorable Aurélien Gill: Honorables sénateurs, je propose que le projet de loi soit renvoyé au comité sénatorial des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'interviens au sujet de la motion concernant le renvoi du projet de loi au comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Comme les honorables sénateurs le savent, je préside ce comité, bien que je m'exprime aujourd'hui en mon nom personnel.

Le sous-alinéa 86(1)m)(vii) du Règlement précise que les mesures législatives concernant le logement doivent être renvoyées à ce que l'on appelle communément le Comité des affaires sociales. Toutefois, comme nous l'ont révélé les deux discours prononcés cet après-midi, une très petite partie de ce projet de loi traite effectivement de questions de logement.

Honorables sénateurs, le projet de loi a trait à l'assurance hypothèque et aux garanties d'hypothèques, ainsi qu'à la régie, à la capitalisation, aux pouvoirs et à la gestion d'une société d'État. Selon mon expérience du Sénat, un tel projet de loi serait renvoyé à l'un des deux comités permanents suivants. Les projets de loi relatifs à la capitalisation, aux pouvoirs, à la régie et à la gestion des sociétés d'État aboutissent souvent au Comité sénatorial permanent des finances nationales. Les projets de loi concernant des questions d'assurance hypothèque et autres se retrouveraient probablement devant le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce qui, en vertu du sous-alinéa 86(1)l)(i), est chargé des banques, des assurances, des sociétés fiduciaires et compagnies de prêts, des sociétés de crédit, des caisses populaires et des sociétés de petits prêts; de plus, en vertu du sous-alinéa 86(1)l)(v), il s'occupe des affaires des corporations.

Par conséquent, je ne doute pas qu'il convient davantage que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce non seulement en raison du mandat de ce comité en vertu du Règlement, mais encore en raison de son expérience ainsi que de l'intérêt et de l'expérience de ses membres.

Étant donné que le projet de loi a été présenté à la Chambre des communes, les sénateurs ont eu connaissance de particuliers et d'organismes voulant faire valoir leur point de vue à cet égard. Il semble que lorsqu'il sera présenté au Sénat, le projet de loi sera renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Par conséquent, nous avons reçu des demandes pour des séances d'information, pour entendre des témoins, et cetera. Dans la totalité des cas, les préoccupations des gens ont trait aux dispositions du projet de loi qui portent sur l'assurance hypothécaire et les garanties, la régie, les pouvoirs, la capitalisation et l'administration de cette société d'État qui s'appelle la Société canadienne d'hypothèques et de logement.

Je me demande donc pourquoi le gouvernement a autant résisté aux démarches non officielles que d'autres sénateurs et moi avons faites et voulant qu'il conviendrait mieux que le projet de loi soit renvoyé non pas au comité des affaires sociales, mais plutôt au comité des banques et du commerce ou au comité des finances nationales.

À ce que je sache, le comité sénatorial permanent des banques et du commerce n'est pas si submergé de travail - il n'est certainement pas submergé de projets de loi - qu'il est impossible de faire une exception dans ce cas. En outre, j'estime que le comité des affaires sociales, dont je fais partie, peut s'attendre à recevoir au cours des semaines qui viennent d'autres projets de loi qu'il est plus apte à étudier.

(1550)

Je ne me plains pas et je ne pense pas que mes collègues du comité se plaindront si nous recevons le projet de loi. Je dis simplement que, à mon avis, le projet de loi devrait être renvoyé à un autre comité qui a plus clairement le mandat de s'occuper de ces choses et dont les membres ont plus d'expérience dans les questions de garanties de prêts hypothécaires, de finance et le reste et qui s'intéressent davantage à ces questions que nous, du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, puisque la question du renvoi des projets de loi aux comités a déjà été soulevée, je voudrais préciser deux points.

Selon le paragraphe 86(2) du Règlement, à la page 97:

Tous les projets de loi, messages, pétitions, interpellations, documents ou autres matières peuvent être renvoyés, sur décision du Sénat, à n'importe quel comité.

Cependant, d'après l'interprétation que je fais du Règlement, et je dois dire que la règle n'est pas parfaitement claire, je dirais que la question dont nous sommes saisis tombe davantage sous le coup d'une règle qui est, en quelque sorte, une règle à rebours, et qui dit qu'il n'y a pas de débat sur une motion portant renvoi d'un projet de loi. Reportez-vous à l'alinéa 62(1)i):

62(1) Sauf dans les cas prévus ailleurs au Règlement, sont sujettes à débat les motions:

i) de renvoi d'une question, sauf une loi proposée, à un comité permanent ou spécial [...].

Si vous prenez cette disposition à rebours, elle dit que seul le renvoi d'une question autre qu'un projet de loi peut faire l'objet d'un débat. Par conséquent, le renvoi d'un projet de loi ne peut pas faire l'objet d'un débat. Cependant, avec la permission du Sénat, nous pouvons faire ce que nous voulons.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'entendre l'honorable sénateur Carstairs?

Des voix: D'accord.

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je prendrai la déclaration du sénateur Murray comme une question m'étant adressée. Il veut donc savoir si le projet de loi sera renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

Le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie parce que nous espérons que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce sera saisi du projet de loi C-72 plus tard cette semaine. Il devrait ensuite recevoir les projets de loi C-67 et C-78, qui, me dit-on, devraient prendre pas mal de son temps. En outre, ce projet de loi n'a pas été renvoyé au Comité sénatorial permanent des finances nationales parce que celui-ci compte recevoir le projet de loi C-71 plus tard cette semaine.

J'ignore à qui le sénateur en a parlé officieusement. Je n'avais pas entendu dire avant maintenant que l'on aurait voulu renvoyer le projet de loi ailleurs. Je dois avouer que, compte tenu des travaux des autres comités, j'estime que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie est le mieux placé, pour l'instant, pour étudier ce projet de loi. C'est pourquoi j'ai choisi un membre de ce comité pour le parrainer.

(Sur la motion du sénateur Gill, le projet de loi est renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.)

Pêches

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Gerald J. Comeau, conformément à l'avis du 6 mai 1999, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des pêches soit autorisé à siéger à 17 h 30, le mardi 11 mai 1999, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

(La motion est adoptée.)

Projet de Loi d'exécution du Budget de 1999

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Wilfred P. Moore propose: Que le projet de loi C-71, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 février 1999, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, je suis heureux de parler au nom du gouvernement à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-71, Loi d'exécution du budget de 1999.

Ce projet de loi touche directement la vie de nombreux Canadiens. Il assure un nouveau cadre historique de financement à notre régime de soins de santé et établit le cadre d'une autre source de financement, à savoir la prestation fiscale canadienne pour enfants. Il touche également le fonctionnement de l'appareil gouvernemental. Mentionnons notamment des domaines comme la gestion de la dette, l'administration de l'impôt sur le revenu, les taxes imposées par certaines premières nations, les pensions de la fonction publique et les négociations collectives. Ces mesures témoignent de notre volonté constante d'avoir un gouvernement efficace et efficient responsable sur le plan financier, tout en investissant dans une économie et une société plus fortes.

Permettez-moi de commencer avec les soins de santé. L'assurance-maladie est l'un des programmes sociaux auxquels nous tenons le plus. Il permet de s'assurer que tous les Canadiens, quels que soient leurs moyens financiers, aient le même accès à des soins de santé de grande qualité en fonction de leurs besoins et non de leur capacité de payer. C'est pourquoi le maintien et le renforcement de notre régime de soins de santé est l'une des grandes priorités de notre gouvernement et un élément essentiel de ce projet de loi.

Le projet de loi C-71 met en oeuvre une augmentation de 11,5 milliards de dollars des sommes consacrées aux soins de santé par l'entremise du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Cet investissement aidera les provinces à répondre aux préoccupations immédiates des Canadiens au sujet des soins de santé et leur offrira en même temps une stabilité et une prévisibilité à long terme. Les provinces recevront 8 milliards de dollars par l'entremise du transfert sur quatre ans à compter du 1er avril de l'an 2000. Les 3,5 milliards de dollars de plus seront offerts sous la forme d'un supplément ponctuel immédiat au TCSPS à partir des fonds disponibles au cours du présent exercice. Les provinces peuvent décider elles-mêmes combien elles retireront annuellement de ce total au cours des trois prochaines années.

Permettez-moi de vous expliquer l'importance de ces chiffres. Lorsque l'augmentation du financement atteindra 2,5 milliards de dollars en 2001-2002, l'appui financier direct du gouvernement fédéral au titre du TCSPS sera de 15 milliards de dollars par année. Le volet santé du Transfert canadien sera alors aussi élevé qu'avant la période d'austérité, au milieu des années 90. Cependant, cela ne s'arrête pas là. Lorsqu'on ajoutera les transferts accrus de points d'impôt au titre du TCSPS aux sommes versées, l'aide totale aux provinces atteindra un nouveau sommet de 30 milliards de dollars en 2001-2002.

En outre, les disparités entre les provinces quant au montant par habitant accordé en vertu du TCSP seront éliminées. D'ici l'an 2001-2002, toutes les provinces recevront le même montant de droits par habitant, ce qui se traduira par un montant d'aide équivalent pour tous les Canadiens en matière de santé et de services sociaux. Le gouvernement augmente les transferts au titre des soins de santé et assure aux provinces et aux territoires un financement plus stable et plus prévisible.

L'autre mesure dont je voudrais parler concerne la Prestation fiscale canadienne pour enfants, ou PFCE. Comme les honorables députés le savent, la PFCE est le principal instrument fédéral de soutien financier pour aider les familles à revenu faible ou moyen avec des enfants et contribuer au Régime national de prestations pour enfants.

Le PFCE se compose de deux éléments. Une prestation de base de 1 020 $ par enfant pour les familles ayant un revenu égal ou inférieur à 25 921 $, avec élimination progressive au-delà de cette somme. Le supplément du Régime national de prestations pour enfants qui prévoit des prestations maximales de 605 $ pour le premier enfant, de 405 $ pour le deuxième et de 330 $ pour chaque enfant additionnel pour les familles avec un revenu égal ou inférieur à 20 921 $. Il devient nul lorsque le revenu familial dépasse 25 921 $.

Le projet de loi C-71 propose des modifications à ces deux éléments. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont jeté les bases d'un Régime national de prestations pour enfants qui aidera à combattre la pauvreté chez les enfants. La stratégie est d'accroître les prestations fédérales versées aux familles à faible revenu avec des enfants tout en intégrant davantage les programmes fédéraux, provinciaux et territoriaux afin de réduire les obstacles à la participation des parents à faible revenu à la population active. En 1997, le gouvernement fédéral a annoncé sa première contribution à cette entreprise nationale - une augmentation de 850 millions de dollars des prestations versées au titre de la PFCE. Ces fonds ont commencé à être accordés en juillet dernier, augmentant l'aide apportée à plus de 2 millions d'enfants et leur famille. Le budget de 1998 annonçait qu'un montant supplémentaire de 850 millions de dollars serait affecté à la suite de consultations avec les gouvernements provinciaux et territoriaux. Le projet de loi C-71 fait suite à ces consultations.

(1600)

Le maximum prévu par enfant au titre du Régime national de prestations pour enfants sera accru d'un montant de 350 $, versé en deux étapes, soit 180 $ en juillet 1999 et 170 $ en juillet 2000. Une autre mesure hausse le niveau de revenu net à partir duquel le supplément commence à diminuer. Ce niveau passe de 25 921 $ à 27 750 $ en juillet 1999, et de 27 750 $ à 29 590 $ en juillet 2000. On évitera ainsi une augmentation importante du taux marginal d'imposition pour les familles à revenu modeste. Ces changements signifient pour une famille avec deux enfants qui gagne 20 000 $ une hausse des prestations de 700 $, pour un total de 3 750 $ par année.

En outre, les prestations des familles à revenu modeste ou moyen augmenteront de 184 $, ou de 92 $ par famille pour les familles ayant un enfant, en haussant le niveau de revenu net à partir duquel la prestation de base commence à diminuer, soit de 25 921 $ à 29 590 $ en juillet 2000. En conséquence, 100 000 nouvelles familles canadiennes deviendront admissibles à une partie ou à la totalité de la prestation de base. Dans l'ensemble, les mesures prises dans les budgets de 1997 et 1998 assureront 1,7 milliard de dollars aux enfants des familles à faible revenu.

Le projet de loi C-71 précise la distribution des 850 millions de dollars alloués dans le budget de 1998 et affecte 300 millions de dollars de plus à la prestation fiscale pour enfants des familles à revenu modeste ou moyen.

Honorables sénateurs, une autre mesure de ce projet de loi qui vise à aider les enfants dans le besoin établit que les particuliers admissibles dont le revenu ne dépasse pas 25 921 $ auront également droit au plein montant du «supplément pour parents sans conjoint» accordé dans le cadre du crédit de taxe sur les produits et services. Les sénateurs se rappellent que le crédit pour TPS a été instauré pour protéger les Canadiens à revenu faible ou modeste contre les effets négatifs du nouveau régime fiscal.

En plus du montant de 199 $ par adulte et de 105 $ par enfant, le crédit pour TPS prévoit un supplément pouvant aller jusqu'à 105 $ par année pour les célibataires, y compris ceux qui ont des enfants. Ce supplément équivaut à 2 p. 100 du revenu net supérieur à 6 456 $, pour un maximum de 105 $. Pour les parents seuls, cette exigence reliée au revenu signifie que certaines familles à très faible revenu pourraient ne pas obtenir le supplément au complet. De plus, le système national de prestations pour enfants pourrait également avoir des conséquences pour les parents seuls qui reçoivent de l'aide sociale en raison des exigences en matière de revenu. Le projet de loi C-71 traite de cette question et voit à ce que les parents seuls n'aient pas à subir cette perte. Le crédit pour TPS à l'intention des parents seuls à faible revenu sera majoré pour compléter le système national de prestation pour que ces personnes aient droit au montant total de 105 $. Il profitera à 300 000 familles monoparentales à compter du 1er juillet 1999.

Les autres mesures dont j'aimerais discuter, honorables sénateurs, ont trait aux pouvoirs des Premières nations en matière d'imposition. Dans son budget, le gouvernement a de nouveau fait savoir qu'il était prêt à poursuivre la discussion et à faire des arrangements avec les Premières nations en matière d'imposition. Les engagements pris dans les budgets de 1997 et de 1998 ont donné lieu à des arrangements de la sorte avec trois groupes de Premières nations de la Colombie-Britannique. Ce projet de loi facilitera davantage l'exercice des pouvoirs d'imposition des Premières nations.

En Colombie-Britannique, la Première nation de Sliammon aurait le droit d'imposer une taxe de 7 p. 100 comparable à la TPS sur toutes les ventes de produits du tabac et de carburant effectuées dans ses réserves. La TPS fédérale ferait place à la taxe des Premières nations qui serait perçue par Revenu Canada.

La Première nation de Westbank, également en Colombie-Britannique, aurait le pouvoir d'imposer une telle taxe sur la vente de carburant dans ses réserves, en plus de le faire sur les produits du tabac et les boissons alcoolisées.

Le projet de loi modifie également la Loi sur l'autonomie gouvernementale des Premières nations du Yukon, de façon à permettre l'entrée en vigueur des dispositions sur le remboursement de la taxe sur les produits et services, qui ont été ajoutées aux accords conclus l'an dernier sur l'autonomie gouvernementale.

J'en arrive maintenant à une question touchant l'administration fiscale. Par suite d'un accord de services conclu l'automne dernier entre Revenu Canada et la Nouvelle-Écosse, les dispositions sur la confidentialité de la Loi de l'impôt sur le revenu sont modifiées pour restreindre la communication de renseignements sur les contribuables à la commission des accidents du travail de la Nouvelle-Écosse. On permettra également la collaboration et l'échange de renseignements entre Revenu Canada et la commission, afin de garantir le versement des montants dus. Avant d'échanger des informations, le gouvernement fédéral veillera à ce que la commission des accidents du travail adhère entièrement aux règles de la confidentialité qui s'appliquent à l'heure actuelle au partage d'informations avec des ministères ou organismes gouvernementaux à l'extérieur de Revenu Canada.

Honorables sénateurs, bien que le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui traite par exemple d'investissements importants dans un système national de soins de santé et dans le bien-être des enfants, il veille aussi à ce que le gouvernement ne perde pas de vue l'importance d'une bonne gestion financière durable. Notre dette, encore massive, nous coûte plus de 40 milliards de dollars par année en intérêts. Tout cet argent ne peut servir à réduire les impôts ou à augmenter les investissements pour renforcer notre économie et notre filet de sécurité sociale. Voilà pourquoi un plan de réduction de la dette a été mis en oeuvre et voilà pourquoi le gouvernement s'est engagé à gérer la dette de la façon la plus rentable possible.

Le projet de loi C-71 nous aidera à atteindre cet objectif en modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques pour améliorer l'efficacité de la gestion des dettes et des risques. Ces modifications clarifient les pouvoirs d'emprunt et de fixation des modalités d'émission des titres du gouvernement fédéral et met à jour les pouvoirs de gestion financière et de gestion des risques du gouvernement fédéral. Bon nombre de ces modifications sont d'ordre technique et souvent confirment ou clarifient des pratiques existantes. Permettez-moi d'en souligner quelques-unes.

La Loi sur la gestion des finances publiques donne au gouvernement le pouvoir de refinancer une dette venant à échéance. Le gouvernement propose de modifier cette disposition de la loi afin de préciser qu'une dette venant à échéance ne peut être refinancée que durant un exercice financier donné. Toute dette non refinancée au cours de l'exercice devient périmée et ne peut être refinancée au cours de l'exercice suivant. Le gouvernement respecte cette pratique depuis de nombreuses années. Ces modifications ne donnent pas au gouvernement un pouvoir d'emprunt accru.

Une autre modification clarifie les modalités d'émission des titres du gouvernement du Canada. Le gouvernement a conclu l'automne dernier, avec les distributeurs de ses titres, une entente quant à de nouvelles règles et conditions de participation aux émissions de titres du gouvernement. Les nouvelles règles énoncent plus en détail les pouvoirs du ministre. Elles visent à améliorer l'intégrité du marché et à maintenir un marché des titres du gouvernement qui fonctionne bien et qui profite à tous les contribuables grâce à un coût réduit de la dette. En outre, le Parlement recevra officiellement chaque année des renseignements sur le programme et les plans de gestion de la dette du gouvernement, ce qui renforcera la structure de reddition de comptes sur une activité importante du gouvernement.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-71 prévoit aussi un certain nombre d'autres mesures. Par exemple, la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique est modifiée dans le but de prolonger la suspension de l'arbitrage obligatoire jusqu'au 20 juin 2001, en ce qui a trait à la négociation collective au sein de la fonction publique fédérale. Le gouvernement croit toujours autant à la négociation collective et à l'attribution de salaires et de conditions de travail justes. Il doit donc agir en conséquence. Ainsi, le gouvernement pourra participer à la prochaine série de négociations collectives et négocier des salaires et des avantages ainsi que la nouvelle Norme générale de classification tout en tenant compte de ses limites budgétaires.

Ce projet de loi modifie les lois sur les régimes de pension de la fonction publique, des Forces canadiennes et de la GRC dans le but d'améliorer les prestations futures. L'une des modifications proposées à la formule de base prévoit un calcul des prestations sur cinq ans plutôt que sur six années de salaire. En outre, la formule utilisée pour l'intégration des prestations versées en vertu du régime de pension de l'employeur et du Régime de pensions du Canada ou de la Régie des rentes du Québec sera modifiée, nettement en faveur des prestataires. La nouvelle formule a pour effet que la réduction des prestations, au moment où un employé commence à retirer des prestations du RPC ou de la RRQ, à l'âge de 65 ans, sera un peu moins importante.

La Loi sur les brevets est aussi modifiée de manière à préciser le pouvoir du ministre de la Santé de verser aux provinces l'argent perçu par le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés auprès de titulaires de brevets ayant vendu leurs produits à des prix excessifs.

La portée de la garantie fédérale des prêts consentis aux institutions financières qui consentent des paiements anticipés aux producteurs en vertu de la Loi sur les programmes de commercialisation agricole est précisée. Le libellé de la LPCA est corrigé de manière à assurer aux producteurs des paiements anticipés au plus bas coût possible.

Nous modifions la Loi sur la Banque européenne pour la reconstruction et le développement pour donner au ministre des Finances le pouvoir de procéder aux transactions financières nécessaires pour honorer nos engagements envers la BERD.

Honorables sénateurs, voilà les faits saillants du projet de loi C-71, Loi d'exécution du budget de 1999. Il ne contient pas toutes les mesures proposées dans le budget de février. Ainsi, les réductions générales d'impôt sont prévues par le projet de loi C-72. Les mesures prévues dans le projet de loi traduisent l'engagement du gouvernement à aborder de façon équilibrée la planification budgétaire et l'élaboration des budgets.

Le ministre des Finances a déclaré dans son exposé budgétaire qu'il ne fallait pas séparer les besoins sociaux et les besoins économiques d'un pays. Il faut tenter de satisfaire les deux de façon équilibrée si on veut avoir un pays en santé et prospère. C'est pourquoi, maintenant que l'équilibre budgétaire est atteint, nous avons proposé un projet de loi qui prévoit des investissements marquants dans un domaine prioritaire comme celui de la santé et vise à aider les enfants dans le besoin.

Rien ne saurait détourner le gouvernement de son engagement à proposer aux Canadiens des budgets équilibrés cette année et dans les années à venir. Ce type de responsabilité financière nous permettra de faire les investissements sociaux et économiques voulus pour préserver un climat économique qui permettra de garder des taux d'intérêt faibles et d'offrir les réductions d'impôts que tous réclament.

J'exhorte les honorables sénateurs à appuyer le projet de loi.

Des voix: Bravo!

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Bolduc, le débat est ajourné.)

Projet de loi de 1998 modifiant l'impôt sur le revenu

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Catherine Callbeck propose: Que le projet de loi C-72, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, mettant en oeuvre des mesures découlant de changements apportés à la Convention fiscale de 1980 entre le Canada et les États-Unis et modifiant la Loi sur l'interprétation des conventions en matière d'impôts sur le revenu, la Loi sur la sécurité de la vieillesse, la Loi sur les allocations aux anciens combattants et certaines lois liées à la Loi de l'impôt sur le revenu, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que je participe aujourd'hui au débat de deuxième lecture du projet de loi C-72. Ce projet de loi découle de mesures qui ont été annoncées dans le budget de 1998. Ces mesures appuient un allégement fiscal général pour les Canadiens à revenu moyen ou faible de même qu'un allégement fiscal pour ceux qui en ont le plus besoin.

Voici quelques-uns des points saillants du projet de loi: une réduction d'impôt pour 14 millions de contribuables canadiens; le retrait de 400 000 Canadiens du rôle d'imposition; un crédit d'impôt pour les intérêts versés sur les prêts étudiants; l'exonération des prélèvements effectués dans les REER à des fins d'éducation permanente et de formation; un crédit d'impôt pour études pour les étudiants à temps partiel; et un crédit d'impôt pour les particuliers prenant soin d'un membre de leur famille.

Les mesures prévues dans le présent projet de loi constituent les premières étapes vers l'allégement fiscal général dont a parlé le ministre des Finances lorsqu'il a présenté le budget de 1998. Le gouvernement a développé ces mesures dans le budget de 1999 et, ensemble, les budgets de 1998 et 1999 assurent un allégement fiscal de 16,5 milliards de dollars au cours des trois prochaines années. Leurs mesures visent d'abord à réduire les impôts des personnes qui ont le plus besoin d'aide, à savoir les Canadiens à revenu moyen ou faible.

Le projet de loi prévoit deux mesures pour un allégement fiscal général. D'abord, il hausse l'exemption personnelle de base des Canadiens à faible revenu. Les sénateurs n'ignorent pas que l'exemption personnelle de base contribue à rendre la fiscalité plus juste en assurant un revenu non imposable de base. Le revenu non imposable de base des Canadiens à faible revenu, qui est de 6 456 $, a été haussé de 500 $ le 1er juillet 1998. Le revenu maximal du conjoint de 5 380 $ et son équivalent ont aussi été haussés de 500 $. Le revenu non imposable des contribuables célibataires gagnant moins de 20 000 $ est ainsi augmenté d'au plus 500 $ et celui des familles gagnant moins de 40 000 $ est augmenté d'au plus 1 000 $. Cette mesure a des répercussions importantes. Grâce à elle, quelque 400 000 particuliers à faible revenu ne figureront plus sur le rôle de l'impôt, sans compter que 4,6 millions de contribuables paieront moins d'impôt sur le revenu.

Le budget de 1999 prévoit d'étendre le montant supplémentaire de 500 $ à l'ensemble des contribuables canadiens et d'accroître l'exemption personnelle de base de 175 $, pour une augmentation totale du montant de base de 675 $. Cela veut dire qu'en 1999, le montant de base que les Canadiens pourront gagner sans payer d'impôt sera de 7 044 $. Ce montant passera à 7 131 $ en l'an 2000. De plus, le montant maximum pour conjoint et l'équivalent du montant pour conjoint passera à 6 055 $. Cette augmentation fera plus que compenser les effets de l'inflation sur ces montants depuis 1992.

Ces mesures profiteront surtout aux Canadiens à faible revenu. En plus des 400 000 Canadiens à faible revenu qui ne paieront plus d'impôt fédéral sur le revenu du fait des mesures contenues dans ce projet de loi, 200 000 autres seront rayés du rôle de l'impôt à la suite du budget de 1999. Au total, 600 000 personnes seront rayées du rôle de l'impôt à la suite des mesures prévues dans les budgets de 1998 et 1999.

Je veux maintenant parler de la deuxième mesure du projet de loi qui propose des réductions d'impôt généralisées. Il s'agit de l'élimination de la surtaxe pour la plupart des contribuables. Les honorables sénateurs se souviendront que le gouvernement précédent avait imposé une surtaxe générale de 3 p. 100 à titre de mesure anti-déficit. Maintenant que le déficit a été éliminé, le moment est venu d'éliminer la surtaxe. Le projet de loi C-72 propose d'éliminer la surtaxe générale pour les contribuables dont le revenu est inférieur à 50 000 $ et de la réduire pour ceux dont le revenu s'établit entre 50 000 $ et 65 000 $. La surtaxe sera complètement éliminée pour quelque 13 millions de contribuables, et un million d'autres contribuables paieront une surtaxe bien moindre. Le budget de 1999 propose d'éliminer la surtaxe générale pour l'ensemble des 15,1 millions de contribuables canadiens au 1er juillet 1999.

Je veux maintenant parler de certaines mesures ciblées du projet de loi. Le projet de loi C-72 comprend des mesures qui ont été présentées dans le budget de 1998 en vue de veiller à ce que tous les Canadiens, et surtout ceux à revenu faible et moyen, bénéficient d'une chance égale d'intégrer un monde en évolution.

(1620)

Dans l'économie mondiale concurrentielle, en constante évolution et de plus en plus axée sur le savoir, au sein de laquelle évolue le Canada, les Canadiens ne sont pas tous en mesure d'avoir accès aux connaissances et aux compétences dont ils ont besoin pour demeurer à la fine pointe d'un marché du travail en évolution. On compte maintenant 2 millions d'emplois de moins qu'en 1981 pour les Canadiens titulaires d'un diplôme d'études secondaires ou moins, tandis que 5 millions d'emplois ont été créés pour les personnes qui ont plus qu'un diplôme d'études secondaires. Des obstacles financiers empêchent de nombreux jeunes de poursuivre des études postsecondaires. C'est pourquoi cette mesure législative comprend plusieurs mesures fiscales pour venir en aide aux étudiants.

Les dettes d'études constituent un important fardeau pour de nombreux Canadiens. En 1990, un diplômé ayant terminé quatre années d'études postsecondaires avait accumulé en moyenne des dettes d'études de 13 000 $. Aujourd'hui, les dettes d'études du diplômé atteignent en moyenne près de 25 000 $. De plus, en 1990, moins de 8 p. 100 des étudiants-emprunteurs avaient une dette supérieure à 15 000 $, alors que cette proportion se situe maintenant à près de 40 p. 100.

Pour atténuer ce fardeau, le projet de loi C-72 prévoit un allégement fiscal pour les étudiants. Ils auront droit à un crédit d'impôt fédéral de 17 p. 100 à l'égard des prêts étudiants du gouvernement fédéral et des provinces. Pour un diplômé qui a accumulé une dette de 25,000 $, cela signifiera 530 $ d'impôt fédéral et provincial de moins à payer rien que la première année. Sur dix ans, cela pourrait représenter un allégement fiscal de 3,200 $.

Souvent, bon nombre de Canadiens n'ont pas les moyens de s'absenter de leur travail pour étudier à temps plein afin d'améliorer leurs connaissances. Plusieurs mesures prévues dans le projet de loi C-72 permettront aux Canadiens d'avoir un meilleur accès à l'apprentissage pendant leur vie. La première mesure permet aux gens de retirer, en franchise d'impôt, des sommes de leurs REER à des fins d'éducation permanente. C'est un régime similaire au régime d'accession à la propriété. Un particulier titulaire d'un REER et inscrit à temps plein à un programme de formation ou à un cours de niveau supérieur pour une durée d'au moins trois mois pendant l'année pourra retirer annuellement 10 000 $ de son REER, jusqu'à concurrence d'un montant maximum de 20 000 $. Pour perpétuer le rôle des REER, qui est de fournir un revenu de retraite, le montant emprunté devra être réinvesti dans les REER sur une période de dix ans, faute de quoi il sera assujetti à l'impôt.

Il peut être particulièrement difficile pour une autre catégorie de Canadiens de se perfectionner constamment - il s'agit du nombre croissant de Canadiens qui étudient à temps partiel tout en travaillant et en élevant une famille. Pour leur venir en aide, le projet de loi C-72 propose d'accorder le crédit pour éducation aux étudiants à temps partiel qui pourront demander le crédit à hauteur de 60 $ par mois où ils ont été inscrits à un cours admissible d'une durée d'au moins trois semaines et comportant un minimum de 12 heures de cours par mois. Cette mesure réduira les coûts de l'éducation et facilitera l'éducation permanente pour plus de 250 000 étudiants à temps partiel.

Pour aider les parents à assurer l'avenir de leurs enfants, le budget de 1998 a créé la Subvention canadienne pour l'épargne-études, qui a été mise en oeuvre par le projet de loi C-36. Le gouvernement versera une subvention égale à 20 p. 100 de la première tranche de 2 000 $ de cotisations à un REEE au profit d'un enfant de moins de 18 ans, à concurrence de 400 dollars par année et par enfant, rendant les REEE encore plus intéressants pour les Canadiens qui économisent pour les études de leurs enfants.

Le projet de loi C-72 apportera quelques modifications aux REEE. À l'heure actuelle, les paiements pour l'aide aux études tirés d'un REEE ne peuvent être faits qu'aux étudiants à plein temps. Tenant compte des besoins spéciaux des personnes handicapées, ce projet de loi permettra aux étudiants à temps partiel handicapés de recevoir les mêmes paiements. En outre, le projet de loi C-72 portera de 40 000 $ à 50 000 $ le montant provenant d'un REEE qu'une personne peut transférer à un REER si ses enfants ne font pas d'études supérieures.

Le projet de loi comporte d'autres mesures ciblées. Mentionnons entre autres le nouveau crédit pour aidants, qui permettra aux Canadiens qui s'occupent à la maison de membres âgés ou handicapés de leur famille de réduire l'impôt à payer d'un montant pouvant atteindre 600 $. Ce nouveau crédit aidera environ 450 000 aidants qui, autrement, ne seraient pas admissibles au crédit pour personnes à charge atteintes d'incapacité.

Cette mesure législative permet également aux travailleurs indépendants de déduire de leur revenu d'entreprise les cotisations qu'ils versent à des régimes d'assurance-maladie et d'assurance pour soins dentaires. On rendra ainsi plus équitable le traitement réservé aux travailleurs indépendants et aux entreprises constituées en société.

Honorables sénateurs, voilà quelques mesures prévues dans le projet de loi C-72 qui se traduiront par d'importants allégements fiscaux pour les Canadiens à faible et moyen revenus. Grâce à l'élimination du déficit, le gouvernement a pu commencer à offrir des allégements fiscaux plus généraux que les Canadiens seront heureux de voir se concrétiser dans les prochains budgets.

J'exhorte tous les honorables sénateurs à souscrire à cette mesure législative. Il n'y a rien de controversé dans ce projet de loi. Il vise à mettre en oeuvre des mesures destinées à aider les Canadiens, surtout les plus démunis.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Tkachuk, le débat est ajourné.)

Régie interne, budgets et administration

Adoption du trente-troisième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du trente-troisième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (Lignes directrices régissant les déplacements des sénateurs), présenté au Sénat le 6 mai 1999.-(L'honorable sénateur Rompkey, c.p.).

L'honorable Bill Rompkey propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Affaires sociales, sciences et technologie

Les dimensions de la cohésion sociale au Canada-Adoption du rapport budgétaire du comité

Le Sénat passe à l'étude du dix-neuvième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (budget-étude sur la cohésion sociale), présenté au Sénat le 6 mai 1999.-(L'honorable sénateur Murray, c.p.).

L'honorable Lowell Murray propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Privilèges, Règlement et procédure

Adoption du dixième rapport du comité

Le Sénat a procédé à l'étude du dixième rapport du Comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure (suspension de l'article 106), présenté au Sénat le 6 mai 1999.-(L'honorable sénateur Maheu).

L'honorable Shirley Maheu propose: Que le rapport soit adopté.

- Honorables sénateurs, ce rapport recommande que l'article 106 du Règlement du Sénat du Canada ne s'applique pas au projet de loi d'intérêt privé qui sera bientôt déposé par le sénateur Taylor concernant l'Église morave. L'article 106 prévoit que toute demande pour un projet de loi privé doit être annoncée par un avis publié dans diverses publications, dont la Gazette du Canada, les principaux journaux de la région intéressée et la gazette officielle de la province en cause. J'aimerais aujourd'hui vous faire part de tous les renseignements dont je dispose à ce sujet.

Honorables sénateurs, le conseil des anciens de l'Église morave d'Amérique a amorcé le processus visant à demander un projet de loi privé en 1991. Il voulait apporter trois modifications à la loi constituante de l'Église dans le but de changer le long titre de la version française, de donner un nom au conseil des anciens de l'Église morave et de faire disparaître certaines restrictions quant aux pouvoirs du conseil en matière d'investissements.

En 1995, l'Église avait publié un avis de dépôt du projet de loi dans la Gazette du Canada, le Edmonton Journal et la Gazette officielle de l'Alberta. La publication de ces avis coûte entre 500 et 1 000 $. Le projet de loi a alors été rédigé et il devait être déposé par son parrain, feu le sénateur Twinn. Ce dernier est décédé en 1997, avant que la requête et le projet de loi n'aient pu être présentés.

Des avis ont paru dans les versions anglaise et française de la Gazette du Canada les 6, 13, 20 et 27 mars 1993, ainsi que dans le Edmonton Journal les 16, 23 et 30 avril et le 7 mai 1993 et dans la Gazette de l'Alberta les 15 et 31 mars 1993 et les 25 et 29 avril 1995.

L'annonce dit ceci:

Notice is hereby given that the Board of Elders of the Canadian District of the Moravian Church in America will present to the Parliament of Canada, at the present session or at either of the two sessions immediately following the present session, a petition for a Private Act to amend its Act of incorporation in order to remove therefrom the limitation on the annual value of property that may be held in Canada by the Church, to provide the Church with a French name, and to make sure such other technical amendments to the Act as may be necessary.

En français, l'annonce dit ce qui suit:

[Français]

Avis est par les présentes donné que le Board of Elders of the Canadian District of the Moravian Church in America présentera à la présente session du Parlement, ou à l'une des deux prochaines sessions de celui-ci, une pétition introductive de projet de loi d'intérêt privé modifiant sa loi constitutive, afin de faire abroger la restriction relative à la valeur annuelle des biens immeubles possédés au Canada par le conseil, de faire attribuer au conseil un nom français et d'y apporter d'autres modifications au besoin.

[Traduction]

Depuis mars 1993, date de l'avis initial, il y a eu trois séances subséquentes. Ainsi, les avis ont expiré.

Le 25 avril 1999, le nouveau parrain du projet de loi, le sénateur Taylor, m'a écrit pour me demander que le comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure renonce à publiciser davantage le projet de loi. Il m'a donné trois raisons: a) les objets identiques du projet de loi ont été annoncés plus tôt; b) étant donné qu'il s'agit d'une oeuvre de bienfaisance, les gens ont du mal à trouver du financement - et les frais de publicité se situent entre 500 $ et 1 000 $ - et c) ce n'est pas la faute de l'Église si le processus a été retardé si longtemps.

Honorables sénateurs, conformément à l'article 108 du Règlement du Sénat:

Une motion pour suspendre l'application des règles relatives à une pétition de lois privée n'est recevable que si la suspension est recommandée par le comité permanent des privilèges, du règlement et de la procédure.

Votre comité a étudié la demande du sénateur Taylor lors de sa dernière réunion. Étant donné qu'aucune remarque négative n'a été reçue en réponse à l'annonce, qui a déjà eu lieu, nous avons recommandé, en conformité avec l'article 108, que les dispositions de l'article 106 du Règlement ne s'appliquent pas à la pétition touchant le projet de loi relié à l'Église morave. Si nous avons besoin de renseignements supplémentaires, notre collègue, le sénateur Taylor, sera peut-être en mesure de nous aider, étant donné qu'il est le parrain du projet de loi.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Français]

Les pays en voie de développement

L'éducation et la santé chez les jeunes filles et les femmes-Interpellation-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Losier-Cool, attirant l'attention du Sénat sur la population, l'éducation et la santé dans de nombreux pays en voie de développement, en particulier chez les jeunes filles et chez les femmes.-(L'honorable sénateur Corbin).

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs,je tiens à féliciter et à remercier ma collègue du Nouveau-Brunswick, l'honorable sénateur Rose-Marie Losier-Cool, de son initiative de débattre des problèmes de population, d'éducation et de santé, en particulier chez les jeunes filles de nombreux pays en développement. J'ai aussi apprécié le discours de notre collègue, le sénateur Callbeck. Comment pouvais-je faire autrement, moi qui suis père de trois grandes filles et grand-père d'une petite-fille?

[Traduction]

Honorables sénateurs, aujourd'hui, je voudrais aborder un sujet qui, jusqu'à récemment, n'avait pas été traité avec ouverture d'esprit et détermination. Il s'agit de la mutilation d'organes génitaux féminins, qui compte parmi les pires mauvais traitements qui sont infligés quotidiennement dans certaines parties du monde. Outre la brutale douleur physique, la mutilation d'organes génitaux féminins implique une atteinte grave à l'intégrité physique et psychologique de jeunes filles sans défense. S'il faut traiter sans tarder cette question, c'est notamment parce que, comme le soutient l'Organisation mondiale de la santé, «le taux de mortalité des filles et des femmes victimes de ces pratiques est probablement élevé, mais il existe peu de dossiers sur la question et les décès sont rarement signalés.» Il en résulte des problèmes de santé et des complications liées à la maternité qui durent toute la vie.

La mutilation d'organes génitaux féminins est un problème qui persiste dans plusieurs régions du monde, mais en particulier partout en Afrique et dans une partie du Moyen-Orient. Dans certains pays, c'est un problème endémique. Par exemple, selon un rapport d'Amnistie Internationale sur la question en 1998, 98 p. 100 des filles en Somalie sont assujetties à cette mutilation. Malheureusement, ce n'est pas un exemple isolé. Dans bien d'autres pays africains, le taux est supérieur à 50 p. 100. Dans son numéro de novembre-décembre 1998, la revue Homemakers signale que 126 millions de femmes dans 28 pays ont été sexuellement mutilées. Aujourd'hui, je parlerai des origines et des répercussions de la mutilation d'organes génitaux féminins, de la campagne internationale contre cette pratique et de la contribution du Canada en vue d'éliminer cette terrible pratique.

Pour bien saisir la nature du problème, il faut définir les causes ou les origines de cette pratique. Sans donner la moindre raison, certains ont laissé entendre que cette mutilation était une exigence culturelle traditionnelle permettant aux femmes de maintenir ce qu'elles percevaient comme un statut respectable dans la communauté et une exigence préalable au mariage. D'autres ont expliqué que la religion exigeait cette procédure. D'autres encore ont dit que la mutilation d'organes génitaux féminins était ancrée dans les coutumes locales traditionnelles des villages où elle est pratiquée. Peu importe leurs différences, ces explications présentent des points communs au niveau de leur dynamique sociale. On a aussi laissé entendre que la pratique n'est pas une exigence imposée par les hommes.

(1640)

C'est peut-être ce qui fait la véritable tragédie de cette pratique. La circoncision féminine est pratiquée par des femmes sur de très jeunes filles dans les conditions les plus barbares. En fait, on dit que les plus grands défenseurs de la circoncision féminine sont les femmes qui l'ont elles-mêmes subie.

La justification traditionnelle de la circoncision féminine est plutôt paradoxale. D'un côté, on dit que ce sont les gens pauvres, non instruits et défavorisés qui appuient la pratique. De l'autre, beaucoup de politiciens africains - pour la plupart des hommes, évidemment - qui sont probablement instruits et plutôt bien nantis, n'ont rien fait pour interdire ou criminaliser cette pratique ni appliquer des lois existant déjà dans certains pays. Cela montre à quel point il s'agit d'un défi complexe et prêtant à la controverse.

Même si des dirigeants politiques hésitent à criminaliser la pratique, la révélation relativement récente de celle-ci a mené à l'établissement d'efforts multidisciplinaires pour l'interdire. Beaucoup d'organisations internationales participent à ce mouvement. Les efforts de dissuasion reposent sur des motifs légaux et médicaux.

La circoncision féminine est reconnue comme une violation des principes légaux internationaux parce qu'elle porte atteinte aux droits humains fondamentaux visés par la Charte des Nations Unies. De son côté, le milieu médical s'est dit extrêmement préoccupé par les graves conséquences de la circoncision féminine à court et à long termes pour les victimes de celle-ci.

La dénonciatrice la plus connue de la circoncision féminine est probablement l'ancien mannequin vedette somalien Waris Dirie, qui a subi l'opération lorsqu'elle était une petite fille. C'est peu de temps après que Dirie a émigré seule de la Somalie en Angleterre, où elle a été découverte par l'industrie de la mode. Elle a été nommée récemment ambassadrice spéciale du Fonds des Nations Unies pour la population sur la question de la circoncision féminine.

Les principales organisations qui ont travaillé à l'élimination de la mutilation d'organes génitaux féminins comprennent des groupes de défense des droits de la personne, des groupes du secteur de la santé, des groupes de défense des enfants et des groupes de défense des femmes. Il n'y a aucun pouvoir hiérarchique établi en permanence au sein de ces organisations, et il n'est pas rare qu'elles collaborent à la réalisation de leur objectif commun. Les principaux groupes qui ont participé sont l'Organisation mondiale de la santé, l'OMS, les Nations Unies, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance, l'UNICEF, le Fonds des Nations Unies pour la population, le FNUAP, et l'organisation des droits de la personne Amnistie Internationale. Ces groupes sont voués à l'élimination de l'excision.

Bien que les groupes mentionnés précédemment soient importants pour ce qui est de procurer des fonds et d'exercer des pressions auprès des gouvernements, ce sont les organisations populaires, mises sur pied dans des villages africains par des Africaines, qui revêtent une importance cruciale pour apporter les changements qui s'imposent dans la vie courante. Reconnaissant cette réalité, les grands groupes internationaux ont aidé à mobiliser les femmes des villages où l'on pratique la mutilation d'organes génitaux féminins.

L'éducation est au coeur de la stratégie. L'objectif est de sensibiliser toutes les femmes et les jeunes filles aux questions qui les touchent, notamment les dirigeantes des collectivités et les femmes qui pratiquent l'excision, celles qui sont les plus responsables du maintien de la tradition qu'est l'excision.

Les médias ont aussi contribué à éduquer le public en aidant à réduire la nature taboue de cette question. Il serait probablement présomptueux d'interpréter le point de vue des parties concernées. Cependant, la pratique est tellement implantée dans les moeurs que malgré la douleur aiguë et les souffrances que cela provoque, ces femmes se sentent obligées de mutiler leurs propres filles lorsqu'elles sont très jeunes.

Fait intéressant, il semble que la sensibilisation des femmes africaines aux graves risques associés à la mutilation d'organes génitaux féminins ait été plus efficace pour créer un climat de changement que l'approche juridique ou l'invocation des droits de la personne. On rapporte que, quand elles ont appris les risques de cette pratique pour la santé, les femmes de différents villages se sont alliées pour dénoncer à l'unanimité la mutilation d'organes génitaux féminins. L'exposé des risques de cette pratique pour la santé a été un argument convaincant pour les mères des jeunes filles et les femmes qui pratiquent l'excision. En fait, la santé est à leurs yeux un facteur plus important que les droits de la personne.

Afin d'apaiser les partisans de la mutilation des organes génitaux féminins, on a proposé la médicalisation de cette pratique. Cette solution a été proposée par des politiciens africains lorsqu'on leur a demandé de criminaliser cette pratique. À mon avis, cette solution est tout aussi repoussante. Que cette mutilation soit faite par des professionnels dans un milieu stérilisé ne justifie pas qu'on la pratique sur de jeunes filles innocentes.

Comme Amnistie Internationale et d'autres associations le font remarquer, la légalisation et la médicalisation comportent un danger inhérent. C'est non seulement nier le droit des femmes aux normes d'intégrité et de santé les plus élevées, c'est aussi risquer que les traditionalistes n'acceptent pas cette solution et retournent à l'ancienne coutume.

Honorables sénateurs, de nombreux efforts ont été faits pour s'attaquer au problème de la mutilation des organes génitaux féminins de façon efficace et appropriée. Nous poursuivons nos efforts stratégiques tout en étant conscients de nos intentions et de nos obligations.

À la quarante-septième assemblée annuelle de l'Organisation mondiale de la Santé, en 1994, le directeur général a éloquemment déclaré:

La seule dénonciation de cette pratique peut contenter certains, mais cela ne résout certainement pas le problème. Nous ne devrions pas chercher à critiquer ni à condamner. Nous ne devrions pas non plus rester passifs en invoquant le prétexte d'un multiculturalisme affable. [...] Nous devons constamment supposer que les comportements humains et les valeurs culturelles, quelque insensés et destructeurs qu'ils puissent nous paraître à travers notre optique personnelle et culturelle, ont une signification et une fonction pour ceux qui les adoptent. Les gens ne modifient leur comportement que lorsqu'ils voient que le nouveau comportement qui leur est proposé est aussi significatif et aussi fonctionnel que l'ancien. Par conséquent, nous devons viser à convaincre les gens, notamment les femmes, qu'ils peuvent renoncer à une pratique déterminée sans pour autant abandonner des aspects significatifs de leur culture.

Honorables sénateurs, permettez-moi d'expliquer pourquoi le Canada ne peut pas rester indifférent face à la mutilation des organes génitaux féminins. En tant que législateurs, nous avons la responsabilité morale de faire cesser cette pratique abominable. C'est une question qui relève des droits de la personne et non de l'intolérance culturelle. Nous pourrions être sceptiques à l'égard de cette position, mais après tout, qui sommes-nous pour juger autrui?

Honorables sénateurs, à mon avis, cette question transcende la culture, le sexe, les frontières géographiques, l'histoire, la tradition et les différences individuelles. Certains droits de la personne doivent être protégés partout, surtout lorsque les victimes sont des jeunes filles innocentes et sans défense.

(1650)

Honorables sénateurs, le Canada a bien travaillé, par le passé, pour appuyer le mouvement contre la mutilation des organes génitaux de la femme. En fait, il a été parmi les premiers pays occidentaux à s'engager en ce sens.

Pour ce que est de notre contribution actuelle, les lettres que j'ai échangées avec l'honorable Diane Marleau, ministre de la Coopération internationale, et avec l'honorable Lloyd Axworthy, ministre des Affaires étrangères, m'ont permis d'apprendre que le financement versé par le Canada est maintenu.

Dans sa correspondance, Mme Marleau précise que le Canada appuie la campagne anti-excision dans le cadre de programmes plus vastes qui visent à protéger l'intégrité physique générale des femmes et des filles. Par exemple, entre 1993 et 1997, au Sénégal, l'ACDI a consacré 730 000 $ à des projets visant à améliorer la condition sociale des femmes. Entre 1997 et 2002, 3,5 millions de dollars de plus doivent être consacrés à des programmes voués à la défense des droits et des pouvoirs des femmes, visant notamment à contrer toute forme de violence envers elles et à criminaliser l'excision.

En gros, l'ACDI contribue aux efforts pour l'élimination de la mutilation des organes génitaux de la femme de trois manières différentes: dans le cadre de projets bilatéraux d'organisations non gouvernementales, les ONG; par l'intermédiaire d'institutions d'enseignement et d'associations professionnelles; et enfin, indirectement, au moyen de contributions financières à des organismes multilatéraux comme l'UNICEF et le Fonds des Nations Unies pour la population.

La prochaine Conférence internationale des femmes de la Francophonie se tiendra l'an prochain, en l'an 2000, au Luxembourg. Cette tribune donnera une autre occasion de discuter de la question et d'évaluer les progrès accomplis depuis la Conférence internationale sur les femmes qui a eu lieu Beijing, en 1995.

Le ministre Axworthy me confirme aussi dans une lettre que le Canada appuie l'ACDI ainsi que le travail des ONG qui luttent contre la mutilation des organes génitaux de la femme. Le Canada a aussi appuyé des résolutions adoptées par l'Assemblée générale des Nations Unies qui dénoncent l'excision des petites filles.

Toutefois, nous ne devons pas arrêter là. Il reste encore beaucoup à faire. Nous devons agir efficacement et veiller à ce que les ressources soient acheminées vers des initiatives qui en valent la peine, tout en faisant savoir aux gouvernements des nations où la mutilation des organes génitaux de la femme se pratique encore que cette pratique est intolérable. On y parviendra en fournissant de l'aide à ces pays à la condition qu'ils fassent respecter les lois anti-excision. C'est ma façon de voir les choses. Je sais que tous ne partagent pas mon avis sur ce point. Nous devrions tenir un vif débat à ce sujet; sur le plan des droits de la personne, cette mesure serait l'équivalent d'un embargo.

L'heure est cruciale, honorables sénateurs; nous devons prendre des mesures actives et délibérées pour atteindre notre objectif humanitaire, qui est de mettre fin à la mutilation des organes génitaux de la femme. Si on veut que le mouvement de lutte contre cette mutilation fasse des progrès, il est de la plus grande importance de fournir du soutien et de permettre l'accès à des services au niveau local; il faut aider les plus démunies à s'aider elles-mêmes.

Nous avons le devoir de veiller à ce que les quelque 6 000 victimes quotidiennes de cette mutilation soient entendues et d'intervenir pour alléger leur souffrance.

[Français]

Je m'en voudrais, en terminant, de ne pas reconnaître le travail d'une ancienne page du Sénat, Aneel K. Rangi, dans la recherche et la préparation de mon intervention. Je tiens à la remercier de la qualité de son travail.

(Sur la motion du sénateur Corbin, au nom du sénateur Losier-Cool, le débat est ajourné.)

La Semaine internationale de la femme

La participation des femmes aux institutions législatives-Interpellation-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Joyal, c.p., attirant l'attention du Sénat sur la Semaine internationale de la femme, et sur la participation des femmes aux institutions législatives au Canada, au niveau fédéral et provincial, et particulièrement au Sénat du Canada.

L'honorable Lucie Pépin: Honorables sénateurs, en commémoration de la Journée internationale de la femme, mon honorable collègue, le sénateur Joyal, a rendu hommage aux femmes canadiennes en faisant un vibrant plaidoyer pour une représentation plus équitable des femmes et des hommes dans les institutions politiques.

Le sénateur Joyal a dénoncé, avec raison, un mythe répandu en politique canadienne, qui consiste à croire que des progrès se font constamment et que nous nous dirigeons graduellement vers la parité hommes-femmes en politique. Après plus de 75 ans de représentation des femmes en politique au Canada, le Parlement canadien ne compte que 20 p. 100 de femmes à la Chambre des communes et 30 p. 100 de femmes au Sénat. Ce sont effectivement des progrès très graduels!

[Traduction]

Les statistiques révèlent que les femmes sont le groupe social le plus sous-représenté dans les assemblées législatives du monde entier. Depuis 30 ans, les femmes ont pu accéder à de nombreux métiers non traditionnels, mais les charges législatives demeurent un souhait et un objectif impossibles à réaliser pour la plupart des Canadiennes. Qu'est-ce qui explique cette situation et pourquoi sommes-nous si tolérants par rapport à une chose qui menace de façon aussi évidente la légitimité de nos institutions démocratiques?

Je voudrais ajouter certaines de mes idées aux observations mûrement réfléchies que le sénateur Joyal a faites sur les obstacles que doivent surmonter les femmes en politique. Je veux d'abord dire que la sous-représentation des femmes en politique n'a rien d'étonnant. Elle témoigne simplement de la grande inégalité qui existe entre les hommes et les femmes dans notre société.

Sur le plan politique, l'histoire au Canada et dans le monde entier nous a appris qu'il ne suffit pas de garantir l'équité du système électoral en matière de procédure ni d'appliquer les mêmes règles électorales aux hommes et aux femmes pour assurer l'égalité des sexes en politique. C'est la ligne de conduite que nous avons suivie jusqu'à maintenant et nous voyons le résultat: après 75 ans d'efforts, nous n'avons pas réussi à dépasser les 25 p. 100 de représentation féminine dans aucune des assemblées législatives canadiennes.

Certains pourraient dire simplement que les femmes ne sont tout simplement pas intéressées à poser leur candidature ou qu'il est difficile de trouver suffisamment de candidates pour arriver à l'égalité des sexes. Honorables sénateurs, ce n'est pas un problème d'offre. Ce n'est pas un problème de demande non plus, parce que l'électorat canadien s'est montré très réceptif aux candidates. Il y a, pour le prouver, des femmes accomplies qui ont très bien réussi en politique.

(1700)

Malheureusement, les obstacles à la participation des femmes sont plus sytémiques et plus insidieux que la simple argumentation fondée sur la loi de l'offre et de la demande.

J'attire l'attention des honorables sénateurs sur les recherches et les recommandations faites en 1992 par la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis. Après avoir entendu des femmes, des parlementaires de sexe féminin et des groupes de femmes de tout le pays et avoir effectué une recherche approfondie sur la participation des femmes à la vie politique au Canada, la commission est arrivée à la conclusion que la sous-représentation des femmes tient moins aujourd'hui à la décision qu'est prise dans l'isoloir que c'était le cas auparavant. Les femmes éprouvent de la difficulté à entrer en politique parce que, à de nombreux paliers, elles ne sont pas traitées sur le même pied que les hommes.

[Français]

La commission a remarqué qu'il est difficile pour les femmes au Canada de passer la barrière du processus de nomination établi par un parti politique. Les femmes sont moins susceptibles que les hommes d'être désignées candidates dans des comtés sûrs ou assez sûrs et, souvent, on leur réserve des comtés perdants. Les femmes sont deux fois plus susceptibles d'être en concurrence avec un autre candidat au moment de la mise en candidature.

Cela signifie que les femmes, dont la situation financière est habituellement inférieure à celle des hommes, sont souvent obligées de s'endetter davantage pour se lancer en politique fédérale car elles font face à une rivalité plus grande à l'étape de la mise en candidature.

Le financement des campagnes politiques a été également cité comme un obstacle de taille pour les femmes qui se lancent en politique. Beaucoup de candidates sont issues des milieux de la santé et de l'enseignement tandis que les hommes, eux, viennent le plus souvent du monde des affaires ou du droit. Les femmes ont donc plus de difficultés à recueillir les fonds nécessaires parmi leurs pairs. En moyenne, les femmes gagnent moins, leur situation financière est moins assurée et elles ont plus de difficultés que les hommes à obtenir des prêts bancaires afin de faire carrière en politique.

De plus, étant donné leur situation financière plus précaire, les femmes hésiteront à embrasser la vie politique à cause de l'incertitude professionnelle et du caractère provisoire qu'elle représente.

[Traduction]

La garde des enfants, et en particulier des jeunes enfants, a aussi été citée comme étant un facteur limitatif quand vient le moment pour les femmes de décider si elles vont entrer en politique. Pour exceller dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres sphères, il faut débuter tôt et travailler constamment en vue d'atteindre le sommet. On a constaté que bon nombre de femmes sont entrées en politique à un stade plus avancé dans leur carrière, après avoir élevé leurs enfants. Bon nombre des femmes politiques les plus éminentes au Canada n'ont pas d'enfants.

Enfin, la commission a constaté que les règles et les pratiques des partis politiques jouent un rôle plus important que le système électoral de tout pays donné dans la détermination du niveau de participation des femmes.

On propose souvent la représentation proportionnelle comme panacée en vue d'accroître la participation des femmes à la vie politique. La commission arrive toutefois à la conclusion que dans les pays où les femmes représentent une vigoureuse force politique, les partis politiques sont tenus par leurs règles de trouver, de nommer et d'élire des candidates.

[Français]

Forte des témoignages entendus, la commission a recommandé les mesures suivantes pour accroître la représentation des femmes en politique: que les partis politiques et les associations de comté instaurent des méthodes de recherche plus rigoureuses et plus systématiques lorsqu'ils cherchent des candidatures, afin de repérer et de mettre en candidature des candidates plus représentatives de l'ensemble de la population; que des plafonds de dépenses et des crédits d'impôt soient adoptés au moment de la mise en candidature, ce qui vaudrait aux femmes de faire campagne en étant sur un pied d'égalité avec leurs vis-à-vis masculins plus fortunés; que des déductions pour frais de garde d'enfants soient accordées durant les campagnes de mise en candidature et les campagnes électorales, et cette recommandation s'applique aux candidats et aux candidates; qu'un congé de travail sans solde soit accordé pour obtenir une mise en candidature ou disputer une élection.

Si la représentation des femmes à la Chambre des communes devait tomber sous la barre des 20 p. 100, qu'un plan soit mis en 9uvre pour que les partis politiques en élisent plus, et si on élit un caucus où il y a plus de 40 p. 100 de femmes députés, on pourrait rembourser jusqu'à 150 p. 100 des dépenses électorales d'un parti politique.

[Traduction]

Honorables sénateurs, seulement 20 p. 100 de nos élus sont des femmes, alors que celles-ci représentent 51 p. 100 de la population canadienne. Nous acceptons cet état de fait avec la plus grande facilité, et nous continuons de prétendre que le Canada est une démocratie vigoureuse. Je trouve étonnant que, depuis 1992, année où les conclusions de la commission ont été rendues publiques, à peu près rien ne se soit fait pour faciliter une plus grande participation des femmes à la vie politique au Canada. Face à cette renversante complaisance, je ne puis que citer l'ancienne présidente de la Commission suédoise pour l'égalité:

Tous conviennent que l'égalité est une bonne chose, qu'il faut faire régner l'égalité pourvu que cela ne coûte rien et n'exige que des changements superficiels, pourvu que nous n'ayons qu'à faire de beaux discours, pourvu que ce soit les femmes qui paient le prix...

La situation actuelle est intolérable. Avant toutes les élections, les partis politiques cherchent à montrer qu'ils présentent un plus grand nombre de candidates. Après toutes les élections, les résultats livrent un tableau différent. Renonçons aux beaux discours et faisons des choses concrètes pour qu'un plus grand nombre de femmes réussissent lorsqu'elles entrent en politique. Les faits sont connus. Les analyses sont faites. Nous savons ce qu'il faut faire. Qu'est-ce qui nous empêche d'agir?

J'exhorte le gouvernement à mettre en oeuvre les recommandations de la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis. J'exhorte les partis politiques, à commencer par le mien, à fixer des objectifs qui tendent à la parité des sexes et à prendre des mesures de promotion pour soutenir, repérer et mettre en nomination un nombre sans cesse croissant de candidates.

Enfin, j'exhorte les Canadiennes à exiger, avec plus de ferveur et de conviction que jamais, la place qui leur revient de droit dans les institutions démocratiques du Canada.

(Sur la motion du sénateur Carstairs, le débat est ajourné.)

Les soins palliatifs

Interpellation-Ajournement du débat

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement), ayant donné avis le 6 mai 1999:

Qu'à l'occasion de la Semaine nationale des soins palliatifs, elle attirera l'attention du Sénat sur la question des soins palliatifs au Canada.

- Honorables sénateurs, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui, au début de la Semaine nationale des soins palliatifs, pour attirer l'attention du Sénat sur l'état des soins palliatifs au Canada.

Ces dernières années, on a remarqué une hausse rapide de la fourniture de soins palliatifs. Cette hausse est largement attribuable à une augmentation du nombre de personnes âgées au Canada et à un besoin accru de soins de traitement et de fin de vie adéquats. Par soins palliatifs, on entend les soins physiques, émotifs, psychologiques, spirituels et pratiques qui sont fournis aux personnes atteintes de maladies mortelles et à leurs familles.

Les soins palliatifs ne visent ni à hâter le décès des patients ni à le repousser. Ils ne consistent qu'à inviter les parents, les amis, les bénévoles, les médecins, le personnel infirmier et d'autres professionnels de la santé à travailler en équipe afin que les patients puissent finir leurs jours dans la dignité et le confort, entourés de gens qui les aiment.

Les soins palliatifs constituent une expérience médicale unique. Une fois qu'un patient a atteint les derniers stades de sa maladie, les soins palliatifs mettent fin à la lutte pour la vie et mettent plutôt l'accent sur la venue prochaine du déclin, de la mort et du deuil. L'acceptation de la mort prépare le patient au caractère inévitable de sa condition, plutôt que lui donner de faux espoirs ou de fausses attentes. La recherche d'un traitement passe au second plan pendant qu'est renforcé l'espoir d'une qualité de vie pour les jours qui restent au patient.

Les patients en soins palliatifs se retrouvent dans tous les groupes d'âge, et les soins palliatifs pour enfants constituent une solution de rechange de plus en plus populaire pour les familles dont les enfants sont atteints de maladies incurables. La perte d'un enfant représente de loin la plus difficile expérience qu'un parent puisse vivre au cours de sa vie. Dans bien des cas, les parents épuiseront toutes les possibilités de traitement avant d'accepter la réalité du sort de leur enfant. Ce processus de traitement continu et d'échec est à la fois pénible et source de stress pour toutes les personnes concernées. Ce genre de déception peut souvent être évitée par les soins palliatifs pour enfants, car ils permettent aux enfants souffrant d'une maladie incurable de profiter de leurs derniers jours loin des traitements ou des médicaments qui ont marqué leur courte vie.

(1710)

Je pense à un jeune élève de huitième année à qui j'ai enseigné. Il a eu une tumeur au cerveau et il a fallu l'opérer. Il a ensuite suivi des traitements de chimiothérapie et de radiothérapie. Ses parents étaient tous deux médecins et voulaient faire tout ce qui était possible pour sauver sa vie.

Il est revenu à l'école, où on lui a donné un encadrement spécial. Il a obtenu son diplôme d'études secondaires en même temps que sa classe. Sa tumeur est réapparue au cours de sa première année d'université. Il a alors décidé qu'il était temps pour lui de partir. Il a dû se battre contre ses parents parce que, comme tous les parents, ils voulaient le garder vivant. Pourtant, lorsque j'ai assisté à ses funérailles, quelques mois plus tard, ils ont raconté que, la nuit avant qu'il meure, ils s'étaient réunis autour de son lit, avaient joué de la guitare et chanté tous ensemble. Lors de ses funérailles, nous avons chanté les mêmes chansons que ce soir-là. Il est mort dans la paix et la dignité, entouré de l'amour de ceux qu'il chérissait le plus.

En 1995, le Comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide s'est penché sur les soins palliatifs. Au départ, la question ne faisait pas partie du mandat du comité. Cependant, nous avons entendu tant de témoins nous dire que les gens avaient besoin d'un meilleur soutien au moment de mourir ou de faire face à la mort d'un proche qu'il est devenu évident que les soins palliatifs pouvaient combler ce besoin. Par conséquent, les soins palliatifs et les limites des services de soins palliatifs au Canada sont amplement abordés dans le rapport du comité.

Le comité sénatorial spécial a formulé cinq recommandations précises sur ces soins. Il a recommandé que le gouvernement accorde une haute priorité aux programmes de soins palliatifs dans la restructuration du système de soins de santé. Jusqu'à maintenant, il manque encore de fonds pour financer les programmes et les recherches qui permettraient de faire de ces soins un élément intégral de notre système de soins de santé. Nous avons déposé notre rapport il y a quatre ans. Cependant, il y a eu des progrès dans certaines provinces, notamment dans ma province, le Manitoba, et les fonds consacrés aux soins palliatifs ont été augmentés.

Le comité a également recommandé l'élaboration et l'application de lignes directrices et de normes nationales pour régir les soins palliatifs. Santé Canada a diffusé ses premières lignes directrices en 1989. Des témoins ont déclaré au comité que les normes de 1989 étaient périmées et devaient être révisées. Depuis le dépôt du rapport du comité en juin 1995, il y a quatre ans, l'Association canadienne des soins palliatifs a publié ses propres lignes directrices, à la fin de 1995, qui sont le résultat d'un consensus pancanadien. Même si ces lignes directrices sont similaires aux lignes directrices de 1989 de Santé Canada, elles n'ont jamais été officiellement adoptées par Santé Canada, même si le ministère a fait savoir qu'il les appuyait en principe.

L'Association canadienne des soins palliatifs entend amorcer une deuxième série de consultations cet été afin de créer un nouvel ensemble de normes pour le nouveau millénaire. De plus, le comité soulignait l'importance d'adopter une approche intégrée concernant les soins palliatifs, afin que la prestation des soins, que ce soit à la maison, dans les hospices ou dans des établissements comme un hôpital ou un foyer pour personnes âgées, soit coordonnée le plus efficacement possible.

De nombreux établissements de soins palliatifs, comme le centre Elizabeth-Bruyère, à Ottawa, et l'hôpital St. Boniface, à Winnipeg, offrent à leurs patients des soins palliatifs de qualité supérieure grâce à leur expérience, à l'ancienneté de leurs programmes et à la compétence de leurs employés. Malgré cela, de plus en plus de patients choisissent de rester à la maison et de recevoir des soins dans le confort de leur foyer. Dans de tels cas, il faut veiller à ce que tous les Canadiens reçoivent des soins similaires, peu importe l'endroit où ils choisissent d'être traités.

Dispenser de la formation aux professionnels de la santé sur tous les aspects des soins palliatifs constituait la quatrième recommandation du comité sénatorial spécial. En 1995, la plupart des écoles de médecine du Canada ont reconnu la nécessité d'offrir des cours sur les soins palliatifs, mais aucune des 16 facultés de médecine ne traitait des soins palliatifs à l'intérieur des cours obligatoires. La question des soins palliatifs, si elle était abordée, ne représentait qu'un petit élément ou une petite partie de cours connexes, ce qui n'offrait aux étudiants en médecine que très peu d'informations ou de formation dans ce domaine.

Depuis 1995, peu d'universités ont donné suite à cette recommandation. À l'heure actuelle, l'Université McGill est le seul établissement canadien à offrir un programme plus exhaustif en matière de soins palliatifs, ce qui améliore les connaissances et les compétences de ses diplômés. C'est carrément inacceptable. Vu le nombre de plus en plus grand de Canadiens qui choisissent les soins palliatifs comme solution à leurs problèmes de santé, une bonne formation en matière de soins palliatifs et de contrôle de la douleur doit impérativement faire partie intégrante de notre régime de soins de santé.

Le comité recommande enfin que la recherche en soins palliatifs, notamment le contrôle de la douleur et le soulagement des symptômes, soit diversifiée et intensifiée. Le Canada a déjà été un chef de file dans le monde au chapitre de la recherche en soins palliatifs. C'est qu'à l'époque, les médecins canadiens pouvaient recevoir des subventions et des bourses de diverses sources internationales. Ce financement leur permettait de se livrer à la recherche et de réaliser des gains dans ce domaine très important. Or, ces dernières années, bon nombre de pays ont reconnu l'importance des soins palliatifs. Ils ont donc fait en sorte d'empêcher les médecins étrangers de recevoir ces importants fonds destinés à la recherche, leur préférant des candidats du cru. On a alors assisté à une diminution de la recherche au Canada, faute de fonds disponibles chez nous.

Le Canada doit reprendre son statut de leader mondial des soins palliatifs. Pour ce faire, nous devons accorder à nos médecins tous les fonds dont ils ont besoin pour poursuivre cet important travail de recherche.

Honorables sénateurs, comme je l'ai déjà dit, cela fait presque quatre ans que le comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide a déposé son rapport final. Malgré certains progrès, dans la plupart des cas, les recommandations du comité sont loin d'être appliquées. Cependant, le besoin de soins palliatifs de qualité n'a jamais été aussi grand. Selon des recherches effectuées par l'Association canadienne des soins palliatifs, près de 3 millions de Canadiens prennent soin d'une personne ayant un problème de santé à long terme. Pourtant, seulement 6 p. 100 de la population estime être équipée pour prendre soin, sans assistance extérieure, d'un être cher atteint d'une maladie mortelle.

Étant donné que, durant les dix prochaines années, le nombre de Canadiens âgés de 65 ans et plus devrait augmenter de 20 p. 100, ces chiffres confirment que la population du Canada est en train de vieillir et que les attentes en matière de soins palliatifs grandissent continuellement. Toutefois, le manque d'éducation du public et le manque de connaissances entourant les soins palliatifs ont souvent fait que les patients et leurs familles sont mal informés des options à leur disposition, ou qu'ils se méprennent sur les fins réelles des soins palliatifs.

Selon un sondage national effectué en 1997 par la firme Angus Reid, seulement 53 p. 100 des Canadiens qui ont répondu avaient entendu parler des soins palliatifs et seulement 30 p. 100 pouvaient en fournir une définition. Pourtant, les soins palliatifs en hospice sont les soins que 90 p. 100 des Canadiens disent vouloir à la fin de leurs jours. Il serait peut-être utile de mener une campagne de sensibilisation à cette importante forme de soins de santé auprès de tous les Canadiens, d'un bout à l'autre du pays.

Honorables sénateurs, les soins palliatifs sont évidemment une question nationale. Cependant, comme les soins de santé au Canada relèvent des provinces, permettez-moi de parler de l'état de la question dans ma province du Manitoba.

En novembre 1974, on a ouvert la première unité des soins palliatifs à l'Hôpital général de St. Boniface, à Winnipeg. Cet hôpital devenait ainsi le premier de nombreux établissements de soins palliatifs et il est aujourd'hui l'un des 650 établissements du genre qui existent actuellement au Canada.

L'année a été positive pour la communauté responsable des soins palliatifs dans ma province. Le gouvernement manitobain a récemment annoncé qu'il allait consacrer 3 millions de dollars sur deux ans à l'amélioration des normes et des services en matière de soins palliatifs. Les autorités provinciales de la santé recevront 1,2 million de dollars pour améliorer les services actuellement fournis dans des institutions et assurer la prestation de services communautaires dans des maisons privées. L'autre 1,8 million de dollars sera utilisé par l'autorité en matière de santé de Winnipeg pour rénover l'unité des soins palliatifs de 15 lits à l'Hôpital général de St. Boniface. De plus, au cours de la première année du programme, toutes les autorités régionales en matière de santé de l'extérieur de Winnipeg engageront des coordonnateurs des soins palliatifs, afin d'établir des liens entre les patients et les services disponibles.

Au cours de la deuxième année, la province entend mettre sur pied une équipe d'intervention fonctionnant 24 heures sur 24, avec des médecins et du personnel infirmier qui feront des visites à domicile. Les autorités hospitalières de Winnipeg et les autorités communautaires et de soins de longue durée de Winnipeg vont engager un directeur pour établir des normes provinciales uniformes pour les soins palliatifs. Ces mesures se font attendre depuis longtemps. Déjà, le programme devrait réduire les listes d'attente pour les soins palliatifs tout en libérant 40 lits de plus pour les malades en phase terminale.

(1720)

Les soins palliatifs du Canada sont en constante évolution et on continue de réaliser des progrès dans ce secteur spécialisé des soins médicaux. Malgré cela, on doit prendre des mesures pour s'assurer que tout le monde au Canada a un accès égal à des soins palliatifs de qualité et que nos fournisseurs de soins de santé seront en mesure de répondre aux demandes croissantes pour cette forme de soins dans les derniers moments de la vie d'une personne.

Les recommandations du comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et le suicide assisté demeurent aussi valables aujourd'hui qu'elles l'étaient en juin 1995. Les provinces doivent coordonner leurs efforts pour améliorer les soins palliatifs afin qu'on puisse parvenir à des normes nationales et à une uniformisation des services. Il faut sensibiliser à la question les fournisseurs des soins de santé et tous les Canadiens pour que, lorsque le moment viendra, ils puissent prendre la décision voulue au sujet des soins et des traitements qu'ils recevront dans les derniers jours de leur vie.

Les soins palliatifs constituent un élément essentiel de notre régime de soins de santé. Étant donné les pressions d'une population de plus en plus vieillissante et les normes sociétales en ce qui concerne des traitements et des soins améliorés dans les derniers jours de la vie d'une personne, en tant que législateurs, nous devons apporter les modifications nécessaires pour assurer la prospérité des soins palliatifs aujourd'hui et à l'avenir. En continuant de mettre en oeuvre les recommandations du comité spécial du Sénat, et en approfondissant nos connaissances des soins palliatifs, nous pouvons nous assurer que tous les Canadiens reçoivent dans les derniers jours de leur vie des soins qui non seulement répondent à leurs besoins, mais également rendent leurs derniers jours réconfortants et paisibles pour eux et leurs familles.

Des voix: Bravo!

(Sur la motion du sénateur Carstairs, au nom du sénateur Wilson, le débat est ajourné.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 12 mai 1999, à 13 h 30.)


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